Chaque jour une chanson que je partage avec vous amis lecteurs.
Une chanson en fonction de mon humeur ou de l'actualité du jour.
Une chanson pour danser, pleurer ou tout péter.
Une chanson pour aider à affronter la journée.
Il y a presque un mois, on a fêté (enfin, j'ai fêté, seul, chez moi en buvant un whisky et en regardant l'Etoffe des Héros.) l'anniversaire d'une légende absolue.
Chuck Yeager.
Coucou de mon coucou!
Le général Charles "Chuck" Yeager.
93 ans depuis le 13 février dernier.
Le premier homme à avoir franchit le mur du son en avion.
Pas n'importe quel avion. Le Bell X-1
Un suppositoire orange équipé de petites ailes taillées comme des lames de rasoir pour découper le ciel.
Le 14 Octobre 1947, Chuck Yeager, qui n'a que 24 ans, monte à bord du suppositoire orange qu'il a affectueusement baptisé "Glamourous Glennis" en hommage à sa femme (parce que Chuck Yeager est un romantique) pousse le moteur-fusée de son coucou à fond et découpe le ciel de la base d'Edwards, Californie pour faire un bond dans l'histoire.
La veille, il se bousille deux côtes en tombant de cheval, mais craignant de se faire retirer le vol test par l'armée de l'air, il ne dit rien et scie alors un bout de manche à balais pour lui permettre de faire levier et fermer la trappe malgré ses côtes en vrac.
Quelques années plus tôt, pendant la guerre, aux commandes de son Mustang P51, il abat 13 avions allemands, dont 5 la même journée. Il est également un des premiers pilotes à abattre un Me 262, le premier avion à réaction.
Bref, un cow-boy avec un zinc à la place du canasson.
Yeah. J'ai la plus grosse brique de Tetris du monde derrière moi
Il battra d'autres records, testera d'autres avions fous, sera un des instructeurs de Neil Armstrong lui-même (souviens-toi de Neil) sera mandaté par Ronald Reagan pour faire partie de la commission d'enquête pour comprendre ce qui est arrivé à la Navette Challenger qui explosa au décollage et se permettra encore quelques cabrioles aériennes jusqu'à 90 ans.
Mais, chose dingue, cette légende vivante, ce pionnier pur, celui qui a cette véritable étoffe qui fait les héros est retourné en Europe dans les années 50.
Et de Juillet 1956 à Juillet 1957, il a commandé une base.
La base aérienne de Toul-Rosières.
Oui.
Chuck Yeager a vécu à Toul-is-cool.
Imaginez mon étonnement et mon excitation quand j'ai appris ça.
Alors puisqu' Internet est un outil fantastique, j'ai pris mon courage à deux mains, j'ai mis mon masque à oxygène et mes lunettes de vol, je me suis inspiré de ces fous du manche qui s'aplatissaient violemment dans le désert de Mojave aux commandes d'un prototype hasardeux au nom de la défense nationale recherche et de l'exploration et je lui ai écrit.
Moi, Moyen, j'ai envoyé un mail à un Général de l'US Air Force qui a laissé une empreinte indélébile dans l'histoire moderne.
Et il m'a répondu.
Avec cette verve lyrique et poétique de ces aventuriers qui voient au-delà des frontières, des barrières et du ciel, ce phrasé romanesque des légendes.
(oui, j'ai préservé mon anonymat.)
Avouez que ça en jette, hein?
Ah ça, vous êtes bluffés.
Bon, je fais un peu lèche-botte dans mon courrier, je le confesse, mais question prose, il est pas mal non plus.
Et il répond EN FRANCAIS !
Ma fierté.
Mon fait d'arme.
Et comme j'aime les avions et la musique, j'avais profité de l'occasion d'un petit exercice de montage dans mon école de cinéma pour leur rendre hommage.
Et à Chuck Yeager également...
Chuck Yeager m'a donc appris au moins deux choses:
A voir au-delà des limites et des barrières, même invisibles, car c'est là que se trouve le bonheur et à compter ses mots.
Et en bonus, la version Live Unplugged qui fait frissonner...
Je voudrais revenir quelques instants sur le décès de Neil Armstrong le 25 Août dernier.
Un aventurier, un des plus grand héros de tout les temps, une inspiration et surtout un homme qui a participé à forger mes rêves et à me faire aimer les avions...
Il obtient son brevet de pilote à 16 ans (âge auquel moi-même je m'enfonçais encore des crayons dans le nez en sifflant des bières) et décroche une licence d'aéronautique avant de participer à la guerre de Corée.
Basé sur un porte-avion, il effectuera 80 missions sur avions de chasse pendant 3 ans.
A son retour au pays, il finit ses études est intègre la NACA, l'ancêtre de la NASA.
Devenu pilote d'essai, il va faire partie du prestigieux corps des pilotes de X-15, l'avion le plus incroyable jamais construit.
Un tuyau de cheminée posé sur un réacteur de fusée qui va fracasser tous les records de vitesse et d'altitude et ouvrir grandes les portes de l'espace.
Ce corps d'élite basé sur la mythique base aérienne d'Ewards, baptisé "Les Vrais Compagnons" dans le formidable livre "L'étoffe des Héros" (the right stuff) de Tom Wolfe (le bûcher des vanités) va dépasser toutes les limites possibles et imaginables.
Il faut bien comprendre qu'au moment où le projet X-15 est lancé, un autre projet concurrent est mis en branle avec précipitation pour damer le pion aux russes: Le Projet Mercury.
Envoyer un homme dans l'espace.
Mais pendant que les astronautes de Mercury étaient propulsés dans l'espace à bord d'une lessiveuse automatique, des sondes dans le dutre et la vessie, tournant comme une horloge autour de la Terre avant de s'aplatir mollement dans l'Atlantique, les Vrais Compagnons, à bord de leur tuyau de cheminée, partaient de l'aile d'un B-52, le plus gros bombardier de l'époque, se satellisaient à la limite de la mesosphère, à presque 100 km d'altitude, écrasés dans leurs fauteuils et se posaient ensuite peinards sur un des nombreux lacs asséchés d'Edwards, dans les hauts plateaux du désert de Mojave.
La vraie différence, c'est que tandis que les astronautes tournaient comme des boules de loto, ils n'influaient en rien sur le vol.
Les meilleurs pouvaient tout au plus provoquer des fluctuations de leur température anale pour faire des blagues au contrôle au sol mais finalement, ils piquaient le boulot à un chimpanzé.
Les Vrais Compagnons, de leur côté, décollaient, allumaient les moteurs en serrant très fort les fesses pour que le réacteur de 245 Kilonewtons ne leur explose pas dans le dos, braquaient leur tuyau de cheminée vers l'espace, faisaient rugir le ciel et se posaient où ils voulaient.
Et si ils ne volaient que quelques kilomètres plus bas que les Mercury, connaissaient le phénomène d'apesanteur et les dangers du vide spatial, ils ne gagneront jamais la reconnaissance et la gloire des Mercury, même si les ailes d'astronautes leur furent attribuées.
Enfin, dernière injustice, le formidable film tiré du formidable livre de Tom Wolfe ne mentionnera jamais le projet. (même si au détour d'une scène, on peut voir Scott Crossfield, mythique pilote du projet X-15.)
A l'époque du projet X-15, Armstrong est l'élève d'un pilote encore plus mythique.
Chuck Yeager.
Chuck Yeager est pilote pour l'armée en 1947, et c'est pour l'armée qu'il va tenter le pari fou de franchir le mur du son.
Alors que beaucoup de ses collègues travaillaient pour des agences ou des compagnies privées (Northtrop, McDonnell-Douglas, Bell) et étaient bien payés, c'est pour sa solde de Capitaine et l'uniforme bleu de l'US Air Force qu'il accepte la mission.
Le 14 octobre, un boum retentit dans le ciel du haut désert Californien.
A Edwards, tout le monde pense déjà à un nouvel échec, le Bell X-1 s'étant désintégré en plein vol.
Mais c'est le mur du son que Yeager explose, le faisant rentrer dans l'histoire comme l'aviateur le plus célèbre de la planète.
(entre 1955 et 1957, il dirigera la base aérienne de Toul-is-Cool-Rosière rajoutant un peu plus à ma fierté d'être Toulois.)
Mais revenons aux entraînements d'Armstrong.
Une anecdote nous permet de cerner en partie le personnage qu'il était.
Pendant le briefing d'un vol avec Yeager, Armstrong analyse toutes les données et décide que l'atterrissage se fera sur un lac asséché.
Yeager, homme de la terre, John Wayne aérien à la longue expérience, lui annonce que connaissant bien la région et au vu des conditions météo, le lac ne sera certainement pas assez sec, risquant d'embourber l'avion et d'interdire tout redécollage.
Armstrong, qui analyse chaque donnée tel un ordinateur, maintient son choix d'après ses relevés météo.
L'avion s'embourbe comme prévu et Yeager se tourne alors vers Armstrong pour lui annoncer que lorsque la nuit sera tombée, il fera très vite moins quinze. Quelle solution adopter?
Armstrong, dont les facultés de calculs et d'analyse prodigieuses lui permettaient de trouver des réponses dans tous les cas resta muet ce jour-là.
Après le programme X-15, il est selectionné pour les missions Gemini puis Apollo.
Et le 21 juillet 1969, il marche sur la Lune, image que vous avez tous vues (surtout ces dernières semaines, après l'annonce de sa disparition.) et balance tranquillement la phrase la plus célèbre de l'histoire de l'humanité.
Il y a finalement très peu de photographies de Neil Armstrong sur la Lune, car c'est lui qui avait l'appareil photo mais celle-ci est certainement ma préférée:
Après son exploit, il se retire de la vie d'astronaute et devient enseignant dans une modeste faculté à Cincinnati.
Il retournera exceptionnellement à la NASA pour diriger la commission d'enquête chargée d'établir les causes de l'accident de Challenger (L'incident le plus grave de l'histoire de la NASA. La Navette Challenger explose en plein décollage sous les yeux horrifiés des spectateurs dont les familles des astronautes et les élèves de l'une d'entre eux, alors institutrice...) avant de retourner à sa chaire d'ingénierie spatiale de Cincinnati.
Cet homme humble et discret a tourné sa vie vers ses rêves et les façons de les accomplir.
Il préférait enseigner et partager sa passion de l'espace et des aéronefs plutôt que continuer à vivre dans la gloire et sous les projecteurs de la NASA.
Il ne signait plus d'autographe, scandalisé par le trafic qu'ils suscitaient pour des sommes astronomiques (jeu de mot du jour.)
(il a même attaqué en justice son coiffeur qui avait vendu une partie de ses cheveux, le forçant à verser l'argent qu'il avait gagné de la vente à une oeuvre caritative de son choix.)
On le reverra au Congrès Américain, en 2011, acceptant la médaille d'or du congrès, plus haute distinction que l'on puisse faire à un civil.
Le 25 Août 2012, il rejoint les étoiles une dernière fois.
Je regarde la lune parfois le soir, et je la vois triste d'avoir perdu son ami.
Alors je lui fais un clin d'oeil, comme l'avait demandé la famille du héros.
Mais ce qui me rend le plus triste, au-delà de la perte d'un tel homme, c'est que l'esprit qui animait ces pionners, ces réalisateurs de rêves, semble avoir disparu.
Qui pour le remplacer, pour nous faire croire que parfois, l'humanité est capable de tels exploits que la raison même de notre existence trouve enfin sa justification au milieu du napalm, des cendres et du sang?
Qui pour nous pousser à franchir les barrières de la science et de la technologie, pour surmonter nos peurs, l'espace d'une seconde ou le temps d'une vie?
Je me réjouis tout de même de savoir que forcément, cet aventurier suscitera encore de nombreuses vocations.
Des enfants, en ce moment-même, regardent l'espace à travers des jumelles ou un petit téléscope, font voler des maquettes d'avions et se disent qu'un jour, eux aussi, ils nous emmèneront tous là-haut, reviendront, partageront leur joie et nous rendront fiers d'être sur cette planète, au point de vouloir explorer celle d'à côté.
J'aimais cet homme, car à vouloir ne pas garder les pieds sur terre, il a fini par les poser sur la Lune.
Et dans un tout autre registre, sachez que les cours magistraux de Moyen sur Dr Dre ont repris sur le merveilleux site centrifugue.fr que je vous conseille chaleureusement.
On bouge la tête nonchalamment en cliquant sur l'image: