Chaque jour une chanson que je partage avec vous amis lecteurs.
Une chanson en fonction de mon humeur ou de l'actualité du jour.
Une chanson pour danser, pleurer ou tout péter.
Une chanson pour aider à affronter la journée.
En fait, depuis trois semaines, je ne pense qu’à une chose.
Ce soir, le Paris Saint-Germain va jouer une finale de ligue des champions contre l’Inter de Milan. Des italiens.
Mon club, ma ville, ma capitale.
Lectrice, lecteur, Scarlett. Si tu n’es pas familier(e) avec la ligue des champions, sache que ce sont les meilleurs clubs de foutchebol d’Europe qui s’affrontent dans une compétition féroce qui récompense l’équipe la plus riche , plus tricheuse, la meilleure.
C’est très difficile.
Un peu comme monter les marches du Sacré-Cœur en courant sans s’arrêter ou écouter les politiques actuels sans avoir envie de se crever les oreilles.
Et cette année, le PSG, cette finale, le club l’a méritée.
Une équipe soudée, solidaire et besogneuse, sans star, sans caprices ni dramas. Une équipe qui court et, incroyable, fait des replis défensifs. Une équipe presque devenue une famille grâce au coach Enrique.
Paris a mérité sa finale.
Mais moi aussi.
Parce que depuis que j’ai découvert l’élégance de Raí (le frère cadet de Socrates, ce héros dont je t’avais déjà parlé, mais si, souviens-toi, c’était là) dans un maillot bleu et rouge en 1993 et que je me suis attaché à ce club, j’en ai vécu des émotions. D’autant plus depuis 20 ans que je vis à Paris.
Des Raí, donc, des Djorkaeff, des victoires en coupes des vainqueurs de coupes (qui n’existe plus), des fax qui se perdent, des triplés, des Le Guen et des Guérin, des frappes d’Okocha, des naufrages face à la Juve, Ronaldinho, Pauleta, frôler la relégation, le Qatar, le dernier match de Beckham, le premier de Zlatan, le premier but de Messi avec Paris, en direct au Parc, sous La Tribune Auteuil en feu pour ses trente ans, les clowneries de Neymar.
Et franchement, j’ai vécu plus de déceptions que d’euphories. Parce que pour un triplé de Raì face à Bucarest, j’ai vécu des défaites contre Gueugnon ou Lorient. Des éliminations improbables et des blessures lunaires. Et entre autre, un truc tellement dingue que le mot est rentré dans le dictionnaire.
Je me suis fait charrier, chaque année. Parce que j’y peux rien. Chaque année j’y crois. Chaque année je me dis que ça va aller. Comme avec le XV de France.
J’ai vécu des déceptions amoureuses moins difficiles que certains matchs. Moins douloureuses que des coups de sifflets. J’ai vécu des belles journées moins belles que certaines frappes.
Bien sûr, j’ai toujours la Lorraine et le FC Metz et l’ASNL dans mon cœur. Metz parce que c’est le club de mon père, surtout. Une belle relation avec les grenats et mon papa.
Mais le PSG c’est le mien de club. C’est Ronaldinho, en 2003 et en pleine gueule de bois, qui détruit l’OM chez eux au point que le Vélodrome se lèvera pour l’acclamer.
Et quand on me dit « mais Moyen, pourquoi tu n’encourages pas une équipe qui gagne plus souvent, tu aurais moins mal? » Ben je vous dis que je ne peux pas. C’est comme ça. C’est ma malédiction. Et encore, j’aurais pu tomber plus mal, comme une équipe Espagnole ou l’OM.
Nathalie Ianetta, directrice des sports de Radio France et Juventina dans le cœur fait un très beau texte sur les supporters cette semaine .
Les supporters peuvent être les pires personnes possibles. Grossières, bêtes et racistes. Et ça donne des Heysel. Mais les supporters peuvent être les personnes les plus touchantes. Par la joie et la peine partagées. Par les chants. Par la fidélité.
Et les filles qui portent des maillots sont les plus jolies. (Parce que ça leur va mieux qu'à des moustachus ou des chauves qui soufflent au bout de 12 marches en essayant de faire les escaliers de Montmartre en courant)
Maintenant qu’il ne reste qu’une marche, justement, je la veux cette coupe aux grandes oreilles. Et si ils gagnent, l’hymne de la champion’s league deviendra l’hymne de la chanson du jour pendant au moins une semaine.
Et si ils perdent ? Il y aura du chagrin, évidement.
Mais surtout, pour une fois depuis longtemps, il y aura de la fierté. Pour Donnaruma, Marquinhos, Kvaratskhelia, Dembele, Doué, Hakimi, Kimpembe, Pacho, Ruiz, Vitinha.
Paris et moi avons mérité cette finale. Pour tous ces moments de chagrin partagés.
Mais surtout, aujourd’hui, Paris mérite ses supporters.
Aujourd’hui, l’organisation des internationaux de France de Roland-Garros célèbre le plus grand joueur de terre battue de tous les temps.
Rafael Nadal.
14 titres sur la terre de Paris.
14.
La performance est ahurissante. Légendaire. Unique.
Mais retournons en Mai 2021.
Passé le choc de la nouvelle donnée au téléphone d’un cabinet de radiologie, il a fallu agir très vite pour mettre immédiatement les protocoles en place et accessoirement ne pas avoir trop le temps de réfléchir et du coup de paniquer.
Juin 2021.
À cette période, je m’étais donné un plan de bataille. À ce moment-là, je ne pensais plus à gagner le match. C’était trop loin. Et j’avais enchaîné des défaites, il me fallait des victoires.
J’étais devenu totalement dépendant et vivait donc chez ma sœur, j’avais perdu mes cheveux, mais j’étais pas inquiet, je savais qu’ils allaient revenir* , je n’avais pas réussi à échapper aux nausées, bref le score était pas ouf.
J’ai donc décidé de réduire entièrement mon ambition et de me donner chaque jour des petits objectifs à remplir. Pour avoir des victoires et remonter au score.
Aller a pieds au coin de la rue. (Il y a littéralement 6 pas)
Aller chercher le petit-déjeuner (à 100m)
Remonter les 9 étages à pieds.
Et ainsi de suite.
Comme ça, ça me donnait des petites victoires si j’y arrivais. Je gagnais chaque jour un échange de plus dans un match en 5 sets.
Et vous savez qui m’a inspiré cette idée de chercher des petites victoires pour oublier les défaites?
Rafael Nadal. Un tennisman.
2013, demie-finale de Roland Garros contre Djokovic. Mené 2-0 d’entrée dans le 5 eme set. Il finit par gagner (encore) le match.
En interview d’après match, il dira justement qu’à ce moment-là, mené 2-0, il ne cherche même plus à gagner le match. Il veut juste réussir sa première balle de service. Pour mettre son adversaire en difficulté. Et si il réussi cette première balle, il peut essayer de gagner l’échange. Et ainsi de suite. Des petits objectifs. Pour avoir des victoires dans la tête. Casser la spirale de défaites. Incroyable de force mentale.
Et le 7 septembre 2021, je suis parti tôt le matin, j’ai randonné et je suis parti à l’assaut du massif de Montmartre. En Free solo. Sans corde.
J’avais préparé mon ascension, repéré les voies et chemins d’accès et les difficultés potentielles.
Et alors, je me suis assis sur les marches du Sacré-Coeur, et pour la première fois depuis des mois, j’ai pu admirer une de mes vues préférées au monde.
La foule n’existait pas. J’étais seul, comme si je regardais la mer pour la première fois.
T’as vu la vue?
J’étais arrivé au dernier set.
Balle de match…
* spoiler: pas tous.
Je n’ai pas retrouvé cette interview. J’en viens même à me demander si elle a vraiment existé. Mais j’aime savoir qu’un type qui tapait dans une balle m’a aidé à gagner un match marathon juste par sa discipline mentale.
Vous savez ce qu'il y a de bien avec la pluie qu'on se colle maintenant depuis le 12 septembre dernier et qui nous fait croire qu'on est encore en Novembre?
Ben du coup, l'ami Supporteur Irlandais, quand il vient pour l'Euro chez nous, il est pas dépaysé.
Il retrouve l'ambiance de sa verte contrée avec ses moutons (il y a bientôt des élections) ses bières et ses whiskys, parce que bon, on peut se le dire, c'est pas la peur de mourir mitraillés qui nous empêche d'aller en terrasse, c'est la pluie, mais ça ne nous empêche quand même pas de boire des coups.
Et ses chansons.
Alors, détendu, le supporteur Irlandais devient, avec Picasso, Chagall, Le Grand Palais, l'Océan, les rousses, les oursons guimauve et les vinyles, une de ces choses qui font que la vie vaut la peine d'être vécue.
Parce que sous la pluie, l'Irlandais est le soleil.
Pensez donc, nous sommes à deux doigts de nous taper sur le coin du museau sans attendre qu'une guerre nucléaire ou un Djihadiste saoul décide de nous décimer et eux, les Irlandais, ils arrivent chez nous pour l'Euro avec leurs chants et leurs whiskys, boivent nos bières et nous rappellent que même devant du foot, la vie est belle.
EXEMPLES :
Lorsque l'un d'eux, certainement un peu trop amateur de nos bières et de son whisky marche sur une voiture et en enfonce le toit, ben hop, ils glissent des billets à travers les portières pour payer les réparations et tapent sur la carrosserie pour lui rendre son aspect.
La classe Irlandaise.
A bordeaux, ces farceurs, pour montrer qu'ils sont romantiques la bière à la main, se mettent à 850 pour chanter la sérénade à une jeune fille, pendant que votre Jules, Mesdemoiselles, il rouspétait devant Portugal - Autriche et l'inefficacité chronique de cette tanche de Christiano Ronaldo.
L'élégance Irlandaise.
A Bordeaux toujours, au petit matin, après avoir chanté, ils ramassent leurs poubelles et nettoient le parc où ils s'étaient installés. En chantant. Et une bière à la main
Le respect Irlandais.
Et enfin, puisque visiblement ils ont bien aimé (les bars de) Bordeaux, en prenant le Tramway, et puisqu'ils sont sensibles, ils chantent une berceuse au petit bonhomme qui est là avec son père et enguirlandent les gugusses qui font trop de bruit.
La Délicatesse Irlandaise.
Du coup, je suis fier qu'ils soient nos adversaires en 1/8ème de finale dimanche et je serai bien sûr dans un pub pour assister au match.
Mais mon coeur saigne aussi un peu, parce que soit ils perdent et je serai triste et leurs supporteurs partiront, soit ils gagnent, et je serai triste parce que la France aura perdu.
Amis Irlandais, je vous aime et bien sûr, vous revenez quand vous voulez. (non pas que je souhaite violemment que vous partiez Dimanche.)
On chantera et on boira des bières. Et j'ai toujours dit que si vous n'aviez pas été aussi alcooliques, vous auriez dirigé le monde. Permettez-moi de me corriger.
Je crois que si nous avions tous bu et chanté comme vous le faites, nous aurions tous régné sur le monde ensemble et c'est bien la pluie qui nous aurait chassés de nos terrasses.
Oui, oubliez Deleuze, Heidegger, Jaspers ou Sylviane Agacinski, le verbe ne s'est jamais aussi bien exprimé qu'à travers la bouche d'un homme qui faisait parler ses poings.
Un homme qui un jour s'est levé et à coups de directs du droit et de paroles, a renversé à peu près toutes les barrières qui pouvaient exister. Non seulement pour lui, mais pour tous les noirs et pour la planète entière.
Comme je ne veux pas que ce blog finisse par ressembler à une interminable chronique nécrologique, en souvenir de The Greatest, nous allons nous lever et danser (avec l'aide du groove affolant de James, bien évidemment.)
Faisons simple, des mecs de ce calibre, il en existe un par siècle, à peu près.
Muhammad Ali ne boxait pas, il dansait.
Il dansait avec légèreté. Il volait sur le ring, esquivait, glissait et assommait.
Surtout, Ali se tenait debout et chacune de ses paroles, chacun de ses gestes, tout son corps, toute son âme le criait: I'm Black and I'm proud.
Et son verbe assommait plus que ses poings.
Un roi qui parle. Un verbe incarné, une parole de feu qui se gravait pour toujours dans le marbre de l'histoire et dans l'esprit des gens.
Car Ali ne parlait pas finalement. Il éclairait.
Noir et fier, il n'a jamais renié ses convictions.
Il a refusé de partir au Viet-Nam. ça lui a coûté son titre de champion du monde, son droit de boxer et sa liberté.
Il refuse les pronostiques qui annoncent qu'il va se faire réduire en bouillie par George Foreman à Kinshasa.
Foreman, un bulldozer humain, impitoyable puncheur invaincu à l'époque en 40 combats. Dont 37 KO.
Ce 30 Octobre 1974, dans la nuit Zaïroise, il refuse le destin qu'on lui promet et forge le sien à la 8ème reprise en terrassant son opposant.
Noir et Fier, il annonçait être le plus grand, le plus rapide, le plus malin et le plus beau.
Et il avait raison.
Il dansait sur le ring, il dansait avec les mots mais féroce, la vie lui a volé cette grâce.
Et Philosophe, encore une fois, il acceptera que son créateur le mette à l'épreuve physiquement et encore une fois, refusera que son esprit soit moins vif.
Il est le seul dont l'étoile sur Hollywood Boulevard est accroché sur un mur et non dans le trottoir. Parce qu'il ne voulait pas que son nom soit piétiné.
Parce qu'il était noir et fier.
Une dernière fois, en hommage au Greatest, dansons.
6 semaines de joie, bonheur, pintes de bières et tampons dans le menton.
Alors pour fêter ça, voici mes 5 moments préférés de la Coupe du Monde de Rugby
(notez que j'ai volontairement omis les coupe du monde de 1987 et 1991, qui contiennent pourtant leur lot de moment cultes, parce que je ne les ais pas vécues en direct comme les autres, l'émotion à posteriori étant quand même moins forte que la mandale du moment même...)
18 Juin 1995: Demi-Finale Angleterre - Nouvelle-Zélande
Le Jour où Mike Catt est devenu un tapis humain.
La veille, l'équipe de France a vécu une demi-finale dantesque face aux Springboks, futurs vainqueurs de l'épreuve. Dans des conditions apocalyptiques, sur un terrain transformé en piscine olympique par des trombes d'eau, les bleus encaissent le défi physique ahurissant imposé par les Sud-Africains mais se voient refuser 3 essais tandis que celui accordé à Ruben Kruger n'était pas valable. L'équipe de Christian Lacroix, auteur de 15 points avec 5 pénalités marquées s'incline 19-15.
Le 18 juin, donc, la deuxième demi-finale oppose le XV de la rose aux All Blacks. Et depuis le début de la compétition, on assiste à la naissance d'un phénomène hors-norme.
Jonah Lomu, Néo-Zélandais d'origine Tongienne.
Un monstre d' Un mètre quatre-vingt-seize pour cent vingt kilos qui abat le 100 mètres en moins de 11 secondes et qui a à peine 20 ans à ce moment-là.
Peut-être la seule vraie star planétaire de ce sport où l'individualité disparait au profit de l'équipe.
Les blacks sont sur un (long) nuage (blanc) quand ils entrent sur la pelouse face aux Anglais.
Ils ont écrabouillé tous leurs adversaires avec une facilité effrayante et leur ailier vedette (parce que oui, cet autobus humain n'est ni deuxième ligne, ni troisième ligne, mais bien ailier. Des mensurations hors-normes pour un joueur de ce poste.) est en train de se satelliser à la vitesse de la lumière autour de la planète ovale.
Mais les exploits qu'il a accompli jusqu'à présent ne sont rien en comparaison de ce qu'il s'apprête à faire.
Les Anglais croient pourtant en leur chance, surtout qu'ils sortent de 3 grands chelems glanés dans les 5 éditions précédentes du tournoi des 5 nations et règnent sur l'Europe.
Ils comptent donc bien montrer à leur adversaires qu'il faudra compter avec eux et aller chercher la victoire ne sera pas chose aisée, bloody hell!
Cet état d'esprit guerrier god dammit tiendra deux minutes.
Graeme Bashop, le demi de mêlée du XV de la Fougère, sentant le coup à jouer au large catapulte alors Lomu qui peut mettre en marche son incroyable énergie cinétique.
Un premier Anglais tente de le bloquer, il sera balayé d'un raffut dévastateur.
Arrive alors le capitaine Carling, qui, à 30 ans, ne peut rivaliser avec la vitesse de course de l'Homme-Montagne. Mais sa tentative ne sera pas vaine et une cuillère désespérée déséquilibre le géant.
Lomu a vu sa vitesse réduite de moitié, perd ses appuis et déjà Mike Catt, dernier rempart de la forteresse anglaise, se dresse sur sa route.
Lomu l'enfonce alors comme une vulgaire porte en balsa et lui marche littéralement dessus avant d'aller aplatir tranquillement dans l'en-but.
Pas au sens figuré. Non, le pauvre Catt doit encore avoir une empreinte de pied, pointure 52 fillette sur le torse.
Les Anglais de s'en remettront jamais et Lomu marquera encore 4 essais, scellant la victoire des All Blacks 45 à 29.
Et alors que tout le monde les voit alors favoris pour remporter le titre, il faudra l'esprit d'un peuple, le souffle de l'histoire et le leadership de deux hommes, un noir et un blanc, Mandela et son capitaine François Pienaar, pour les arrêter dans leur course folle.
31 Octobre 1999: Demi-Finale France - Nouvelle-Zélande
Le Jour où le XV de France a terrifié les All-Blacks.
En ce jour d'Halloween, le XV de France se retrouve face à à la plus belle collection de monstres de l'histoire.
L'équipe de Lomu, Umaga, Mehrtens, Anton Oliver, Taine Randell, ou Christian Cullen. Un peu comme une dream team, mais en meilleure.
Pour bien comprendre le contexte de ce match, il faut savoir que la France avait fini dernière du précédent tournoi des 5 nations et qu'à l'été, lors de sa tournée dans le pacifique, elle s'était fait désosser sans anesthésie 54-7 par cette même équipe Néo-Zélandaise.
Autant dire que bon, les voir comme favoris face à leurs bourreaux, c'est un poil abusé.
Suite à cette débâcle dans l'hémisphère sud, Fabien Galthié reste en Nouvelle-Calédonie, persuadé, à raison, qu'il ne sera pas sélectionné pour la Coupe du Monde.
Mais suite à diverses blessures, il est rappelé et prendra les clés du camion pour diriger cette équipe à qui on promet un enfer noir.
Un enfer noir qui se concrétise à la 26ème minute lorsque Lomu, toujours lui, s'empare de la balle aux 22 mètres français et pulvérise 5 bleus (dont Ntamack et Abdelatif Benazzi, qui n'ont pourtant pas des gabarits de danseuses étoiles. Benazzi rebondira même comme un vulgaire culbuto en caoutchouc en allant percuter le n°11 néo-zède.) sans même être ralenti dans sa course.
Transformation du génie Mehrtens. 14-10 pour la Fougère.
Et pourtant.
Et pourtant, à la mi-temps, c'est dans les yeux des hommes des antipodes que l'on lit le doute et la peur.
Parce que l'enfer va changer de couleur à la deuxième mi-temps.
Les Français reviennent survoltés, en transe, persuadés qu'ils ont un coup à jouer. Ils hurlent dans les vestiaires: regardez-les, ils doutent! Ils ont peur!
Et le miracle, la magie arrivent.
Tout ce que les français tentent sont des coups au but. Tout ce que les blacks tentent sont des échecs. Les Français sont à présent des guerriers. Des soldats. Une armée. Galthié n'hésite pas à partir au plaquage sur Lomu. Il se retrouve à l'horizontale, flottant comme un drapeau derrière le joueur prodige, mais le fait tomber. Au contact avec Umaga, Richard Dourthe revient avec une poignée de dreadlocks du colosse dans les mains.
Les valeurs de l'Ovalie, en somme. (respect de l'adversaire, fair-play, rester digne dans le défaite, fier dans la branlée et impliqué quand on colle une fourchette dans les yeux de son opposant.)
Le match est une folie. Une guerre.
Et les blacks ne voient plus le ballon. La furia française les bouscule, les écrase comme une avalanche. Ils cherchent des solutions qu'il ne trouveront jamais pour endiguer les attaques bleues.
Submergés par ces 15 fous furieux qui vont au sacrifice sur chaque ballon, sur chaque contact, ils capitulent petit à petit.
Il semble que les français sont finalement devenus les All Bleus.
43-31.
La plus grande équipe du monde, peut-être de tous les temps est détruite. En lambeaux.
En finale, les français s'inclineront presque logiquement contre l'Australie et la magnifique paire Larkham - Gregan.
Mais ça n'a finalement pas d'importance. Ils avaient joué le plus grand match de l'histoire de leur sport.
Et ils l'avaient gagné.
22 Novembre 2003: Finale Australie - Angleterre
Le jour ou Jonny Wilkinson est devenu Sir.
Nous sommes en prolongation. 17-17. L'Australie, tenante du titre, rêve d'être la première équipe à conserver son titre, qui plus est sur ses terres.
Et à la 99ème minute, un jeune génie de l'ovale, un gentleman, une classe vivante claque un drop stratosphérique et envoie le XV de la Rose sur le toit des Dieux.
Le monde se souviendra de lui pour cette élégance des grands, ce fair-play exemplaire, son professionnalisme, son intelligence, dans le jeu et dans la vie au point de s'intéresser à l'Astrophysique alors qu'il est en pleine dépression pour y trouver le salut.
Le monde se souviendra de Monsieur Jonny Wilkinson et un genou à terre, le monde remerciera le sujet de Sa Majesté d'avoir ainsi ébloui et embelli le jeu.
07 Septembre 2007: Matche de Poule, Ouverture de la Coupe du Monde: France - Argentine
Le Jour où le Puma a mangé le Coq
J'aurais pu vous parler du monstrueux quart de finale entre La Nouvelle-Zélande et la France, à Cardiff, qui verra les bleus (encore) croquer la fougère pour filer vers la demi-finale, surtout que ce souvenir est bien meilleur que ce match d'ouverture, mais il faut parfois rendre à César ce qui appartient aux Argentins, ce petit Pays de la planète Rugby, mais au coeur énorme.
Pour moi, le match se gagne dès les hymnes. Les Hommes d'Augustin Pichot, surnommé le Petit Napoléon et capitaine de cette équipe des pumas sont en larmes.
Transcendés par l'émotion il réalisent ce jour-là le premier exploit de leur coupe du monde. Terrasser l'Equipe de France, jugé pourtant favorite sur ses terres.
Les bleus croiseront à nouveau les fauves lors du match pour la troisième place et subiront à nouveaux les coups de griffe des argentins.
Cette équipe, composée à l'époque d'une partie d'amateurs était peut-être la plus belle de cette coupe du monde 2007. Car elle avait le plus gros coeur.
17 Septembre 2011: Matche de Poule Australie - Irlande
Le Jour où le trèfle a provoqué sa chance
Le 17 Septembre 2011, je suis en Ecosse, à Edimbourg, prêt à découvrir les merveilles et les mystères du Pays des lochs et du Whisky.
Mais coupe du monde en Nouvelle-Zélande oblige, je profite de mes petits-déjeuners pour regarder les matchs.
Assis dans un pub Irlandais, au milieu des maillots verts et des pintes de Guiness dès 10 heures du matin, je déguste mes oeufs et mon bacon et buvant des bières du thé (et quand même quelques bières) devant un petit moment d'histoire.
L'Irlande des soldats est debout. Le Ireland's Call résonne dans le pub. Et Captain O'Driscoll sonne la charge face au monstre de l'hémisphère sud, un des favoris de la compétition avec Quade Cooper, son demi d'ouverture phénoménal.
Avec le courage et la foi en leur pays, les Irlandais vont endiguer les attaques des antipodes, perdre un peu de cuir chevelu et gagner le match.
15-6
Et autour de moi, dans un petit pub à Edimbourg, résonne à nouveau le Ireland's Call, la Guiness et les larmes coulent par tonneaux et les yeux humides au-dessus de mon bacon froid, je me dis que mes vacances commencent très bien...
Voici donc quelques moments d'héroïsme, de bravoure et d'émotion, pour vous donner envie à vous aussi d'admirer les combats et les courses qui brûlent les poumons avec un autobus humain lancé aux trousses, le courage de ces hommes, qui, pour un maillot, une nation, un peu de gloire et d'émotions, iront sacrifier leurs bras et leur cuir chevelu pour se sentir fiers d'être vivants...
Ce soir, l'équipe de France féminine de football joue un 1/8 ème de finale contre la Corée du Sud et évidemment, je vais les supporter comme un malade.
Et pour les gros nazes qui pourraient encore penser que "les filles n'ont pas leur place dans le football, c'est un truc de bonhommes" voici un magnifique exemple du contraire...
En septembre 2011, le Fenerbahçe SK, un des trois grands clubs d'Istanbul, décidait d'interdire son stade aux hommes et de le réserver aux femmes et aux garçons de moins de 12 ans, suite à l'envahissement du terrain par les supporters lors d'un match AMICAL (j'insiste sur le mot "amical" puisque ces blaireaux ne peuvent même sortir la carte moisie de l'excuse du "c'était une finale de champion's league et il y a 3 pénos qui n'ont pas été sifflés, ça nous a collé la rage" pour se défendre.) contre le Shakthar Donestk.
Parce que les supporters Turcs sont connus pour être les plus chauds d'Europe, n'hésitant pas à littéralement foutre le feu au stade.
Exemple avec Fenerbaçhe, justement:
Parlez de supporters de football turcs à ma frangine Caro-Magnonne, toute contente d'avoir gagné des places pour PSG-Galatasaray, rencontre de Champion's League en 2001.
Elle a quitté le Parc des Princes quand les fauteuils ont commencé à voler.
Mais revenons au 20 septembre 2011.
Dans un stade bourré à craquer, l'équipe de Fenerbaçhe va donc jouer sous les cris et les chants de 46.000 gonzesses.
Une ambiance survoltée, incroyable, sans aucun débordement, mais avec une ferveur et une passion qui n'avaient rien à envier aux mecs des kops.
Des images magnifiques et historiques, pleines de joie, de chants, de cris, de hurlements, de fièvre.
Je ne dis pas qu'il n'y pas eu un petit "enculé" glissé ici où là, mais sérieusement, ça fait plaisir en les voyant de pas avoir l'impression que les spectateurs sont en train de faire la guerre.
Alors que tant de choses restent encore interdites aux femmes, il serait temps d'en interdire quelques-unes aux hommes.
Et en Ligue 1, monsieur Thiriez, plutôt que de jouer des matchs à huis-clos quand les fans dérapent, pourquoi ne pas interdire le stade aux hommes et laisser les filles y aller comme d'habitude ou pour la première fois, entre copines?
Elles vous mettront une ambiance de folie folle et vous n'aurez pas à trembler pour les fauteuils de vos enceintes, parce qu'elles sont assez intelligentes pour ne pas avoir envie de les jeter.
Cet épisode incroyable est d'ailleurs relaté dans le formidable film Mustang, en ce moment sur vos écrans et qui relate l'histoire de 5 soeurs qui subissent les traditions dans la Turquie d'aujourd'hui.
Un film génial qui renvoie Virgin Suicides aux bégaiements arty d'une réalisatrice qui a surtout subi les traditions Hollywoodiennes.
Cette chanson du jour est dédicacée à ma soeur Caro-Magnonne (fan de foot et de Beyoncé) mais aussi Kiddie, Miss-E, Blondie, Frau, P'tite ème, Babé, Ciseaux Leclerc et toutes mes amies, parce qu'elles ont réussi mieux que moi dans la vie mais qu'elles doivent se battre plus et plus fort que moi tous les jours.
Non, je n'aime pas forcément les coups, les ecchymoses et le sang.
Non, je ne me nourrit pas de violence.
Non, je ne suis pas en extase devant deux corps noueux, tendus de muscles, huilés, chauds, glissants, qui se collent l'un à l'autre dans un ballet grotesque d'esquives et de bourre-pifs.
Non, c'est plus que ça.
J'aime la boxe, pour ce qu'elle a de primitif et de terriblement complexe, à mi-chemin entre la négociation préhistorique à coups de gourdin sur le voisin et les échecs de Kasparov.
J'aime la boxe pour la détermination de deux types qui ont souffert dans une salle de muscu et qui veulent prouver aux autres qu'ils sont les plus forts.
Les plus forts dans la tête, surtout. Les plus impitoyables. Les plus motivés. Les plus courageux.
Deux mentals d'acier qui se détruisent à coup de masses dans la tronche.
Si le rugby est un sport de voyous joué par des gentlemans, la boxe est un sport de gentleman joué par des voyous.
Des tronches de repris de justice, des cerveaux de tracto-pelles.
Pour certains, comme Floyd Mayweather, de véritables hommes d'affaire.
Mais surtout des pitbulls en rut. La virilité en avant, les crocs dehors.
Mais les plus grands, vous les voyez grands sur et en-dehors du ring.
Jean-Marc Mormek, Lennox Lewis, Wladimir Klitschko, George Foreman, Mike Tyson, Sugar Ray Leonard, Jake LaMotta, Evander Holyfield.
Et le plus grand de tous, Mohammed Ali.
Autant de légendes de leur sport, autant de destins brisés comme les mâchoires ou de vies réussies à la force des poings.
Et de la tchatche.
Alors en attendant 03h00 du matin, je vous propose mes chansons de boxe préférées...
Hommage à Rubin "Hurricane" Carter, boxeur emprisonné sur la foi d'un procès douteux, couvert de racisme latent.
En moins de 10 minutes, Dylan balance un uppercut à sa façon avec cette guitare folk et un groove poids lourd.
Un chef-d'oeuvre.
Mama said Knock you out / LL Cool J
Forcément, dans la case égo éléphantesque et punchlines terrassantes, les rappeurs se devaient de reprendre l'imagerie de la boxe. Même origines commune, la rue, même moyen d'élévation social par l'égotrip,
Ici, LL Cool J cite Mohammed Ali. Humblement.
The Hitter / Bruce Springsteen
Bruce "The Boss" (ça sonne comme un nom de boxeur) Springsteen, la voix de l'Amérique des cols bleus, des travailleurs, ouvrier, trimeurs en usine, syndicalistes, devait forcément parler de ces mythes américains, nés de la poussière et des prisons, dont l'imagerie replonge jusqu'à la grande dépression, avec ses combats clandestins, ses os brisés, ses estropiés et ses orphelins.
Il écrit The Hitter pendant la tournée du Ghost of Tom Joad en 1996 mais ne la sort que 10 plus tard sur le splendide Devils and Dust. Un titre d'album qui pourrait résumer toute l'histoire de la boxe.
The Boxer / Simon & Garfunkel
Parce que vous pensiez sérieusement y échapper?
The Champ is Here / Lupe Fiasco
Comme quoi, Mohammed Ali reste le premier rappeur.
Lupe Fiasco, l'anarchiste, le sample directement pour son titre. The Champ is here chantait Ali en frappant ses congas.
Eye of the Tiger / Survivor
Vous pensiez sérieusement y échapper, bis ?
You beat me to the Punch / Mary Wells
Parce que oui, évidemment, les filles peuvent aussi parler boxe. Surtout quand elles parlent d'amour.
I Think i can beat Mike Tyson / Jazzy Jeff & The Fresh Prince
Avant de faire le clown sur les écrans, Will Smith faisait le clown dans le micro.
Au point d'imaginer qu'il pouvait battre Iron Mike...
Gonna Fly Now (Rocky OST) / Bill Conti
La chanson qui vous fait partir heureux le matin au boulot, qui vous fait soulever les meubles tout seul, changer un roue de bagnole sans cric ou nettoyer votre salle de bain sans pause.
La chanson qui m'a fait monter TOUTES les marches du sacré-coeur (presque) en courant.
Enfin, je vous conseillerai évidemment de regarder Raging Bull, le chef-d'oeuvre de Martin Scorsese sur la vie terrible de Jake LaMotta, When We Were Kings, le documentaire incroyable de Leon Gast sur le combat Ali - Foreman à Kinshasa, Zaïre, LE Combat du siècle (et je rajoute pour la peine le formidable livre Le Combat du Siècle de Normal Mailer.) où chaque phrase sortie par Mohammed Ali résonne comme un discours de Martin Luther King.
Mais aussi Le Champion, avec Kirk Douglas ou Body and Soul de Robert Rossen.
Et ruez-vous sur Warrior de Gavin O'Connor (avec Tom "la masse" Hardy et Joel Edgerton. Et si le film parle plus de Mixed Martial Arts (arts martiaux mixtes, une discipline qui se pratique dans une cage en forme d'octogone et non sur un ring et qui voit les combattants s'affronter en utilisant des techniques issues de divers sports de combat comme la boxe, le Muay Thaï, la lutte, le judo et qui est sujet à de vives controverses éthiques malgré son caractère entièrement professionnalisé) son traitement est tellement touchant et juste à travers le destin de ces deux combattants de middle-class qu'on dirait vraiment une chanson de Springsteen mise en image.
Donc forcément. J'aime bien.
Et qui dit Boxe, dit ring-walk, ce moment culte ou le sportif traverse la scène pour rejoindre le ring sous le regard des milliers de personnes en transe.
Un moment-clé, où tout se joue déjà, où il faut impressionner l'autre en face et lui montrer qu'on ne se laissera pas mettre en bouillie facilement.
Voici pour moi le plus beau ring walk que j'ai pu voir à la télévision.
En 2002, je veillais tard pour regarder Tyson affronter Lennox Lewis.
Et Lewis a mis tout le monde d'accord ce soir-là en faisant son entrée sur Crazy Baldheads de Bob Marley quand la plupart choisissaient des titres rentre-dedans avec des subtilités de marteau-piqueurs.
Voilà, tout ça pour vous dire que la boxe va au-delà des uppercuts et des morsures d'oreille et que si le charisme animal de Mike Tyson ou les discours de Mohammed Ali résonnent encore aujourd'hui, au milieu du bling-bling et des combattants-hommes d'affaire de l'ère moderne, c'est parce qu'il ont toujours cherché à voir au-delà de leurs poings.
Bon alors, à moins de vivre au fond du Larzac ou en Corée du Nord, vous savez certainement que demain, c'est le coup d'envoi de la Copa del Moundial da Brazil.
L'occasion pour moi de vous parler du plus grand joueur Brésilien, juste après Garrincha mais quand même devant Pelé parce que faut pas déconner.
Socrates Brasileiro Sampaio de Souza Vieira de Oliveira (j'imagine même pas le cauchemar des professeurs Brésiliens quand ils font l'appel au début de la classe...) ou, pour que ça rentre plus facilement sur un maillot, Socrates.
(et tout de suite, bam, ça claque. S'appeler comme un philosophe grec, ça impose tout de suite le respect.)
Epoque bénie où le bandeau dans les cheveux était le symbole d'une certaine élégance...
Un joueur qui n'a rien gagné avec la Seleçao et qui a pourtant été le meneur de jeu de la plus belle équipe Brésilienne qu'on ai jamais vue, celle de 1982, qui se fera sottement éliminer en quart de finale par l'Italie alors qu'il ne leur suffisait (règlement zarbi de l'époque) que d'un match nul pour se qualifier.
Sauf que ces artistes, plutôt que de jouer la montre et d'essayer de tenir le score alors qu'il y a 2-2, continuent d'attaquer de façon flamboyante pendant que ces gredins fins tacticiens d'Italiens développent le jeu qui fera leur gloire, le catenaccio qui, comme son nom l'indique, consiste à défendre courageusement à 10 (avec Dino Zoff dans les buts quand même, au cas où) et à attaquer en contre. Paf, 3ème but de Paolo Rossi et adieu attaques flamboyantes et jeu total, le mur de Berlin sera le football moderne.
Non mais regardez-moi cette merveille...
Pour rajouter une cerise sur le pompon, en 1986, toujours en quarts de finale, ils tomberont sur la France à Platoche qui a aussi vécu une coupe du monde 1982 à donner envie de se mettre à la pétanque boxe.
Match de légende. Emotions, jeu fantastique, tirs au buts.
Socrates rate le sien.
Alors là, vous vous dites, ok, le Moyen, il craque, il nous fait l'éloge d'un loser.
Que nenni, fidèles incultes que j'éclaire de ma lanterne musicale, j'admire un héros.
Laissons la coupe du monde à sa FIFA et à ses vuvuzelas et retournons en 1981.
Le Brésil est en pleine dictature.
Tout le Pays vit sous la coupe d'un régime charmant, une bonne vieille dictature militaire qui, malgré le bruit des bottes qui peut déranger tôt le matin, offre au moins l'avantage de pouvoir sortir de chez soi sans avoir à fermer sa porte à clé, ma bonne dame.
Tout le Pays?
Pas tout à fait, puisqu'une bande d'irréductibles farceurs, les joueurs du SC Corinthians menés par leur capitaine Socrates, décide de résister.
Et ils ne sont pas du genre à ahaner des bribes de discours de miss France à base de "La guerre, c'est mal" puisque ces joyeux lurons mettent en place un système entièrement Démocratique dans le fonctionnement du club et des entraînements.
Ils créent donc la Démocratie Corinthienne.
Rien que ça.
Un idéal Social(iste) où toutes les décisions sont prises collectivement par les joueurs et soumises au vote, y compris le recrutement des joueurs et des entraîneurs.
Bon, il est évident que ce système connait quelques débordements complètement absurdes puisqu'au bout d'un moment, même les pauses pipi lors des déplacements en autocar seront votées à main levée.
Parallèlement à ça, ils multiplient les coups d'éclats et affichant ostensiblement le mot "Démocratie" sur leurs maillots et participent à des manifestations contre le régime et se permettent même de développer un jeu spectaculaire et ultra offensif et de gagner le championnat.
Deux fois de suite.
Un jour de finale de championnat, devant 40.000 personnes, ils entrent sur le terrain avec une banderole sur laquelle on peut lire "Vaincre ou perdre, mais toujours avec la démocratie."
Incroyable de penser que la résistance intellectuelle face à une dictature est venue de gugusses en shorts et crampons qui courent après une balle (et là, subitement, j'ai bien envie de voir Ribery faire un débat politique en claquettes. Comme ça, pour voir.) menés par un grand échalas barbu, un intellectuel au vrai sens du terme, universitaire, révolutionnaire, doté d'une vision du jeu fantastique et d'une foi en son pays et en ses convictions inébranlables.
Le Che en Short.
La démocratie arrive finalement au pouvoir en 1985 au Brésil et les Corinthians décident de mettre fin à l'aventure.
Une aventure unique dans l'histoire d'un Pays.
Et dans l'histoire du Sport.
En 2011, Socrates, l'érudit, le médecin (un doctorat de médecine quand même, le footeux.) au nom de philosophe grec et à la technique de danseur de ballet russe, grand frère de Raï, la légende du PSG (ne riez pas, il vaudra pour toujours tous les Zlatan du monde.) meurt d'avoir trop aimé le vin et la vie libre.
Et aujourd'hui, alors que les dictatures n'ont plus de rangers et de chemises kakis, les Brésiliens sont une nouvelle fois aux portes de la révolte.
Pendant que la FIFA vend à des tarifs prohibitifs les droits télé de leur coupe du monde qu'ils ne pourront même pas voir et s'enrichit à rendre jaloux un émir pétrolier en se sucrant sur les chantiers de stades hors de prix qui ne seront pas prêt et ne serviront que 3 semaines et qui tuent les ouvriers qui les construisent, le peuple voit les tarifs des transports en commun exploser et son pouvoir d'achat fondre comme une glace sur la plage de copacabana.
Et on leur demande de faire un effort, parce que c'est du foot et que le foot mérite bien tous ces sacrifices.
Socrates, tu manques un peu, là.
S'il te plait. Reviens.
Et comme je ne peux vous laisser sur ces notes amères et parce que j'aime quand même le foot et certains de ses plus beaux représentants, en casse-dédie pour le philosophe grec da Brazil.
(et accessoirement, le plus beau match de tous les temps.)
Aujourd'hui, c'est l'anniversaire de Manoel Francisco dos Santos.
Né le 28 octobre 1933 et décédé le 20 janvier 1983.
Un Brésilien, joueur de football, forcément et que l'on connaît mieux sous le nom de Garrincha.
Garrincha, un surnom donné par l'une de ses soeurs, est le nom d'un petit oiseau qui, selon la légende, préfère mourir plutôt que de se laisser attraper.
Garrincha est un corps tordu.
Une colonne vertébrale à l'ouest, des jambes arquées dont l'une est plus courte que l'autre (la différence entre les deux atteindra même 6 cm à l'âge adulte) des genoux en vrac et pourtant peut-être l'un des plus grands dribbleurs de l'histoire du football.
Associé au roi Pelé, il gagne une première coupe du monde en 1958.
Il fait à ce moment déjà la preuve de son talent éclatant, mais c'est son altesse qui se distingue à cette occasion, notamment grâce à ce but somptueux, venu d'ailleurs, alors qu'il n'a que 17 ans.
Mais 4 ans plus tard, Pelé se blesse lors du deuxième match et c'est Garrincha, que l'on surnomme "La Joie du Peuple" tant son dribble resemble à un jeu d'enfant, vivant et plein de joie, qui va emmener la seleçao soulever une nouvelle fois le trophée, après avoir marqué deux doublés: L'un en quarts de finale contre l'Angleterre et le suivant en demie-finale contre le Chili, pays organisateur du Mondial.
Et sans vouloir faire offense à la légende, et malgré ce qu'il peut encore en dire aujourd'hui, l'équipe du Brésil ne devra rien à son Roi dans cette magnifique victoire.
Mais tout à un petit oiseau aux ailes tordues..
Tout à ses dribbles de magicien qui flotte au-dessus du gazon pendant que ses adversaires semblent faits de plomb et ne paraissent pas capables de le suivre.
Tout à un corps désarticulé qui jouait pour le simple bonheur de taper dans un ballon.
Tout à un homme dont le destin tragique sera inextricablement lié à l'ascension de la légende Pelé.
Car Garrincha, aux ailes tordues et aux jambes folles était l'antithèse de Pelé.
Pelé représentait une certaine aristocratie du football, une technique, une classe, une vision du jeu mais aussi de sa carrière. Un fils d'ouvrier, de mineur, éduqué et au tempérament de vainqueur.
Garrincha est un fils métis. D'origine amérindienne, d'un père alcoolique, il est totalement illettré et ne pense qu'à la joie de l'ivresse et le joie du jeu.
Une joie qui se transforme en feu d'artifice sur le terrain.
Une joie du jeu qui feront de lui un des plus beaux artistes à avoir foulé une pelouse.
Une joie du jeu qui deviendra la joie d'un peuple entier.
Après l'exploit du Chili 62, Garrincha va perdre de sa légèreté.
Des problèmes de poids inhérents à ses troubles alcooliques, une certaine propension à laisser des gamins au quatre coins du Pays (il aura 13 enfants de 5 femmes différentes) vont peu à peu l'éloigner des terrains et l'enfoncer définitivement dans la dépression.
Et pendant ce temps, en 1970, Pelé entre dans la légende à jamais en gagnant une troisième coupe du monde.
Les jambes de Garrincha deviennent définitivement trop tordues et trop faibles pour son corps trop lourd et ne peuvent plus faire semblant de cacher l'ivresse.
La joie disparaît.
Il continuera pourtant de tenter les mêmes dribbles, qui ne mystifient plus personne, pour l'amour même du jeu.
Cet homme, que l'on a vu repartir en arrière après avoir réussi un dribble exceptionnel et re-dribbler le même adversaire pour le simple bonheur de continuer à jouer, va disparaître derrière son ombre.
Et Pelé continue de briller dans l'histoire.
Impliqué dans de nombreux accidents de voitures à cause de sa conduite en état d'ébriété (dont l'un tuera la mère d'une de ses maîtresses)
Trop de larmes, trop de drames, il meurt d'une cirrhose, ruiné, abandonné de tous et de sa joie.
Une joie qu'il avait pourtant rendu à un pays entier.
Garrincha était un corps tordu et un homme trop libre et trop joyeux, qui a certainement préféré se laisser mourir plutôt que de se laisser attraper.
Les Jeux Olympiques de Londres ont démarré en fanfare hier grâce à une magnifique cérémonie d'ouverture réalisée par l'incroyablement talentueux Danny Boyle et c'est l'occasion pour moi de vous reparler un petit peu de sport et de la raison pour laquelle je pleure comme une collégienne devant des athlètes qui gagnent et des athlètes qui perdent.
Mes moments préférés des Jeux Olympiques.
Barcelone 1992, Basket-Ball, le rêve de la Dream Team.
La plus grande équipe de sport collectif de tous les temps.
Tout d'abord, remettons-nous un peu dans mon contexte à cette époque.
Il faut savoir qu'en 1992, les images de la NBA étaient très rares, le câble ou canal plus n'étaient pas encore développés et internet n'était qu'un délire de science-fiction encore très loin.
Il était donc difficile d'accéder aux exploits des basketteurs professionnels de la ligue Nord-Américaine mais leur renommée dépassait toutes les frontières et ils étaient déjà des idoles planétaires.
On ne pouvait voir leurs actions que sur des cassettes vidéos (alors mes jeunes amis, une K7 video, c'est l'ancêtre de vos DVD ou Blu-Ray, c'était une grosse boîte de plastique noir à l'intérieur de laquelle une bande magnétique contenait de l'image et du son et pouvait être lue sur un magnétoscope. Une autre grosse boîte noire. Il fallait la rembobiner pour revenir au début et pour passer d'un chapitre à l'autre, fallait appuyer sur avance rapide et attendre des plombes.) que l'on s'échangeaient à la récré.
En 1992, je découvre tout juste le Hip-Hop dans mes oreilles ahuries et les grands joueurs de la NBA devant mes yeux ébahis, donc.
Et un roi commence son ascension.
Michael Jordan.
Mais revenons aux Jeux.
Le Comité Olympique Américain commence à en avoir un poil ras-le-bol de perdre le titre en basket et décide donc d'autoriser les joueurs professionnels à participer aux jeux.
Ils contactent Earvin "Magic" Johnson, légende absolue, pour lui proposer de monter une équipe et d'en être le capitaine.
Il accepte immédiatement.
Car pour Magic Johnson, le challenge va au-delà de la victoire.
9 mois auparavant, il a annoncé sa séropositivité et veut prouver que l'on peut pratiquer un sport à très très haut niveau avec le virus du sida.
Il contacte Larry Bird, son ami et rival de toujours, ravi de jouer à ses côtés pour la bannière étoilée.
Et ils s'adressent d'emblée à Michael Jordan.
Et Michael Jordan fait son Jordan. Il fait sa star et se fait désirer.
C'est finalement sa mentalité de compétiteur qui le pousse à accepter.
Pour la victoire, certes, mais surtout pour observer les méthodes d'entraînement de ces deux géants du Basket-Ball, sachant qu'il devait encore les affronter pour une paire d'années et donc emmagasiner le maximum d'informations sur eux afin de trouver des méthodes pour les battre.
L'équipe finale est alors composée de:
Magic Johnson
Larry Bird
Karl Malone
David Robinson
Clyde Drexler
Scottie Pippen
Charles Barkley
Chris Mullin
John Stockton
Patrick Ewing
Christian Laettner
et son Altesse, "His Airness" Michael Jordan
(Line-Up ahurissant quand on y pense et surtout d'un niveau qui n'a jamais été égalé depuis, tous sports confondus)
Voir autant de stars et d'égos éléphantesques dans une seule équipe aurait pu facilement courir à la catastrophe.
Et le génie viendra de leur coach: L'Immense Chuck Daly des Detroit Pistons
Pour leur premier match, il les oppose à une équipe universitaire et les envoie sur le terrain sans leur donner une seule indication pour les laisser prendre leurs décisions seuls.
Ils perdent lamentablement.
Le message de Daly est clair: Vous êtes une grande équipe, mais sans moi, vous n'êtes rien et surtout sans moi, vous perdrez.
Le lendemain, ils rejouent contre la même équipe, leur collent une déculottée fracassante et la légende entre en marche.
Il n'aura suffit que d'un seul jour pour que cette équipe de rêve prenne ses marques.
Arrive Barcelone.
Ils sont reçus comme des chefs d'états, le public est en délire, leurs adversaires se prennent en photo avec eux avant, après et pendant les matchs.
Et ils régaleront le monde par leur jeu hors du commun.
Un show inoubliable où je retiendrai les sourires gigantesques de Magic Johnson, heureux comme un gosse de jouer des JO pour son pays et fier de vivre la vie qu'il voulait, sans laisser le virus le lui interdire et les vols en apesanteur de Michael Jordan, un de ces sportifs qui me prouvent chaque jour que la beauté peut se rechercher dans la perfection d'un geste et la détermination à l'atteindre.
Une pefection que je range aux côtés de Zinedine Zidane et de Mohammed Ali.
En 1992, je ne suis qu'un gosse de 13 ans qui regarde des étoiles aller plus haut que le ciel.
Barcelone 92, 10.000 mètres Féminin, Le tour d'honneur de Derartu Tulu et d'Elana Meyer
Derartu Sulu est Ethiopienne et noire.
Elana Meyer est Sud-Africaine et blanche.
En 1992, à Barcelone, Mme Tulu devient la première africaine noire à gagner l'or olympique.
Un évènement déjà historique pour cette petite Ethiopienne gardienne de troupeaux sur les hauts plateaux qui s'est certainement entraînée sur des cailloux.
Mais l'histoire ne s'arrête pas à la victoire.
La médaille d'argent revient à Elana Meyer, Afrikaan Blanche.
Et Elana rejoint Derartu, l'embrasse et sous leurs bannières respectives entament un tour d'honneur incroyable.
En quelques foulées, ces deux petits bouts de femme effacent la honte et la violence, font taire les canons et les chiens et montrent au monde que l'Apartheid est loin.
Que l'Apartheid n'est plus la question des hommes mais des ignorants.
Et des aveugles.
Rome 1960, Marathon, La Longue Course d'Abebe Bikila
Abebe Bikila est Ethiopien (lui aussi) et ancien membre de la Garde Impériale de son Altesse Haïlé Sélassié.
Comme on trouve au palais qu'il ne court pas trop mal, on l'envoie à Rome participer au marathon.
Il est entraîné par Onni Niskanen, un membre de la croix-rouge, un Suédois d'origine Finlandaise féru d'athlétisme et qui voit en lui une chance de médaille.
A cause de l'incroyable chaleur qui étouffe la capitale italienne, le Marathon se court le soir avec une arrivée de nuit.
Et Bikila court alors pieds nus.
Toute sa vie il a couru pieds nus et les quelques chaussures offertes par l'empereur ne sont pas assez confortables pour lui.
Il court alors comme sur ses hauts-plateaux, pays des troupeaux et des lions et dépose le favori algérien au 41ème Kilomètre.
Il court sous les yeux de Marc-Aurèle et des empereurs de marbre, passe sous l'arche de Constantin, bat le record Olympique et se contente de quelques étirements.
24 ans avant, Benito Mussolini conquit le pays des chêvre et des lions.
Abebe se contenta de se promener pieds nus devant des empereurs.
Atlanta 1996, 200 m et 400m, la Loco de Waco
Voir en direct sur une petite télévision dans un appartement face à la mer en Espagne un tel exploit est presque un privilège.
Pas uniquement parce qu'être face à la mer est un privilège mais parce que vous vous rendez soudainement compte comment des années de sacrifice, d'entraînement et d'abnégation trouvent leur résolution en 20 secondes sur une piste en tartan.
L'Américain Michael Johnson est texan.
Il se met à l'athlétisme par hasard puisqu'il préfère les études.
"Il a les jambes trop courtes" disent les entraîneurs universitaires, "il ne sera jamais un athlète de classe mondiale".
Il s'en fout, il préfère les études.
Et alors Michael Johnson rencontre Clyde Hart, celui qui sera son entraîneur jusqu'à sa retraite en 2001.
Ensemble ils développent une technique de foulée permettant au Texan de compenser ses jambes trop courtes.
Il passe par des échecs et des éliminations.
Mais en 1996, il est champion du monde du 400 et du 200 mètres et décide de s'aligner sur les deux distances pour tenter de gagner l'or olympique, ce que personne n'avait réussit avant lui.
La Loco de Waco, avec ses chaussures en or va alors se mettre en marche.
Il ne va pas simplement gagner les deux courses, pulvériser des records et entrer dans l'histoire.
Il va montrer qu'il est seul au monde.
Que tout ce travail, ces efforts et ces essais l'ont propulsé au panthéon, sur l'Olympe de la piste.
Il a des kilomètres d'avance, colle tous ses poursuivants deux heures derrière lui.
Il donne l'impression qu'une fois arrivé, il pourrait se prendre un coca, s'asseoir tranquillement et regarder ses adversaires enfin finir la course.
Il est mercure et flash, fait mine de figer le temps et enflamme un stade.
Car sa fréquence de course ahurissante, son rythme mécanique, sa concentration absolue et surtout sa profonde détermination le placent hors du temps et de l'espace pendant 20 secondes.
20 secondes incroyables, un éclair, qui ont du paraître extraordinairement longues pour ses adversaires.
Le 400 mètres est déjà légendaire.
Mais le doublé sur 200 mètre achève d'écrire l'histoire.
"Il a les jambes trop courtes. Il ne sera jamais un athlète de classe mondiale."
Il s'en fout.
Barcelone 1992, 400 mètres, L'incroyable histoire de Derek Redmond et de son père
Derek Redmond est anglais et un des favoris pour le titre sur 400 mètres.
Le coup de feu donne le signal du départ mais c'est une blessure au dos qui foudroye Derek.
Il s'effondre sur la piste.
Pour sa première participation aux Jeux, le jeune homme est abattu, dans une détresse sans fond et pourtant il se relève et décide de terminer sa course à cloche-pied.
Son père saute alors sur la piste, envoie voler les officiels et l'aide à franchir la ligne.
Dans les bras l'un de l'autre, ils oublient le stade, la compétition, les juges et les chronos et dans les bras l'un de l'autre, il partagent la douleur.
Pas de victoire ici.
Et pourtant, la plus belle course du monde.
Et je vous parlais de recherche de perfection au début.
Voila pour moi ce qu'est la perfection.
Une fillette cachée derrière un mur en Roumanie, qui vole avec grâce, touchant à peine ses barres asymétriques et se fend d'un large sourire.
Montreal 1976, Barres Asymétriques, le vol parfait de Nadia Comaneci
Voila, je m'arrêterai ici, vous laissant fouiller dans vos propres souvenirs.
Je vous encouragerai simplement à regarder les Jeux, pas forcément pour le sport (encore que le joie de voir du Beach-Volley féminin inonde mes yeux en ce moment-même) mais pour connaître un peu l'histoire de ces athlètes que personne ne connait, qui traversent la planète, qui viennent de pays en guerre, qui s'entraînent en secret, sur des pierres ou dans des champs de mine pour la joie de concourir pour leurs nations et tenter, pendant quelques secondes dans leur vie, de toucher un rêve ou d'atteindre la perfection.
Je finirai en citant humblement Jesse Owens, afro-américain qui fit l'affront de gagner les jeux de Munich en 1936 sous les yeux fous d'Adolf Hitler.
( Il faut savoir qu'au concours de saut en longueur, lors des qualifications, il mord ses deux premiers essais.
C'est alors Lutz Long, son adversaire, archi-favori et représentant parfait du rêve Aryen de l'oncle Adolf qui lui conseille de reprendre ses marques et de partir de plus loin en rallongeant sa course d'élan.
Il se qualifie de justesse.
Après un concours anthologique, Owens gagnera l'or (après avoir gagné le 100 mètres. Il gagnera encore le 200 mètres et le relais.) et Lutz Long sera le premier à venir lui serrer la main et à le féliciter.
Ils resteront amis jusqu'à la mort de Long en 1943, pendant la guerre. Dans son Testament, Lutz Long s'adresse d'ailleurs à Jesse Owens et signe "ton frère, Lutz" )
«Vous pourriez fondre toutes les médailles et toutes les coupes que j’ai gagné. Elles ne vaudraient pas grand chose comparées à l’amitié à 24 carats que j’ai éprouvé pour Lutz Long». J'ajoute que je vais encourager au taquet l'équipe de France Féminine de Football qui propose plus de jeu en une mi-temps que les garçons depuis 4 années.
Mesdames et messieurs, la vie est belle alors aidez-là en la vivant avec classe.
Chaque jour, nous avons assez d'exemples de personnes dont la rustrerie néandertalienne contamine notre ordinaire pour se permettre d'exiger de notre part un petit effort, un supplément d'âme désintéressé en essayant d'être un peu classe et de s'élever au-dessus de ce que les autres sont en droit d'exiger de vous.
Et quelle meilleure définition qu'un exemple concret et pertinent?
Hier, dans un stade de foot de l'autre côté des alpes, à Turin, il y a eu un moment d'une grande émotion et d'une grande dignité.
Hier, Alessandro Del Piero, 37 ans, a joué son dernier match sous le maillot de la Juventus de Turin.
Et croyez-le ou non, mais si l'on devait chercher une source d'inspiration quand il s'agit d'agir avec élégance et de s'élever un petit peu au-dessus de ce que les autres sont en droit d'attendre de vous, ce joueur de football pourrait avoir une bonne place.
Mr Alessandro Del Piero a porté le maillot de la Juventus de Turin du 12 septembre 1993 au 14 mai 2012.
19 années à porter la tunique noire et blanche du club de la vieille dame.
704 matchs.
290 Buts.
Il a tout donné à son club, fidèle jusqu'au bout.
1995, le club gagne le championnat. Il le gagnera encore en 1997, 1998, 2002 et 2003
En 1996, il gagne la Ligue des Champions. Ce sera la seule fois qu'il soulèvera la coupe aux grandes oreilles.
En 1998, il se blesse en plein match. Les ligaments croisés antérieurs qui lâchent.
Il mettra 9 mois à revenir, travaillera comme un acharné pour retrouver son niveau mais avouera lui-même qu'il y a un avant et un après ce 8 novembre 1998.
En 2006, plombée par les scandales des matchs truqués, la Juve est reléguée en Série B (l'équivalent de la 2ème division) avec un handicap de 9 points.
Del Piero et quelques autres (Gianluigi Buffon, le gardien qui arrête la tête stratosphérique de Zidane en finale de coupe du monde 2006 à la 103ème minute, Pavel Nedved, David Trezeget pour les plus célèbres) décident de rester, de diminuer leurs salaires et de rendre à Turin ce que le club leur a donné.
(Pendant que d'autres, moins nobles comme Fabio Cannavaro ou Zlatan Ibrahimovic préfèrent s'exiler là où les billets sont plus verts...)
Ils finiront champions de Série B la même année et reviendront aussitôt dans l'élite.
Del Piero a alors 34 ans et est au top de sa forme. 21 Buts. Meilleur buteur de Série A pour la saison 2007-2008.
Si il est un joueur emblématique du club, l'âge va pourtant le rattraper.
Au début de cette saison, le nouvel entraîneur Antonio Conte, son ancien coéquipier dans ce même club, le place au poste de remplaçant.
Remplaçant de luxe, certes, mais remplaçant quand même.
Et parce qu' Alessandro est noble, il accepte sans broncher, rentre quand son coach lui dit de rentrer et marque encore.
Parce que plus que tout, il veut tout donner à son équipe dès qu'il en a l'occasion.
A 38 ans.
Le président annonce alors que cette saison sera la dernière de l'Italien sous le maillot du club.
Les tifosis n'osent y croire et pourtant c'est vrai, leur numéro 10 va finalement tirer sa révérence (ou partir vers d'autres terrains...)
Après 19 ans.
Après toute une vie.
Ce qui nous amène donc à ce fameux match d'hier.
Conte nomme Del Piero titulaire, lui donne une dernière fois le brassard de capitaine et l'envoie sur le terrain.
Et à la 28ème minute, Alessandro Del Piero marque son 289ème but pour la Juventus.
290ème en tant que professionnel.
Le stade explose et se lève pour saluer le plus grand joueur de l'histoire du club.
A la 60ème, Conte offre alors à son capitaine la sortie qu'il mérite.
Le satde est debout, crie, chante, pleure.
Del Piero salue, les joueurs adverses traversent tous le terrain pour le saluer une dernière fois et il va rejoindre son banc comme un jour normal.
Le match reprend mais tout le monde s'en fout, le stade continue d'être debout, de crier, de chanter et de pleurer.
Alors une dernière fois, le soldat se lève vers eux et les salue.
(et là, moi, je chialais.)
Hier, c'est plus qu'un grand joueur qui a tiré sa révérence.
C'est un état d'esprit.
Des valeurs.
Pensez-donc, un type qui reste 19 ans dans le même club (surtout un très grand club) même dans les moments durs comme une relégation administrative, qui accepte tout sans broncher par amour du maillot, du club et des supporters, ça parait totalement fou à notre époque ou de jeunes prodiges passent d'un club à l'autre sans état d'âme, à la recherche du contrat le plus juteux et des sponsors les plus attrayants.
Hier, Del Piero est donc sorti par la grande porte.
Mais il n'était pas le seul.
Le Milan AC de son côté a vécu une véritable hécatombe:
Filippo Inzaghi, 38 ans, 11 ans au club, marque son seul but de la saison pour son dernier match, à Milan.
Alessandro Nesta, 36 ans, 10 ans au club.
Gennaro Gattuso, 34 ans, 10 ans au club, il finira la rencontre en larmes.
Clarence Seedorf, , 36 ans, 10 ans au club.
Des chiffres incroyables.
Des folies.
Oui, mesdames et messieurs, je pense qu'il est nécessaire de s'élever dans notre vie de tous les jours.
De faire preuve de classe et de donner plus que ce que les autres sont en droit de vous demander.
Car ce n'est pas de cela dont ils se souviendront.
Mais c'est de tout cela dont nous serons fiers.
Ce sont des joueurs de foot qui me l'ont prouvé hier.