jeudi 23 août 2012

With My Own Two Hands / Ben Harper



Aujourd'hui, dans mon RER, je regardais par les fenêtres les champs de grues de la Plaine Stade de France, parce que je trouve ça joli les grues. On dirait de grands dinosaures las qui se traînent pour porter des tuyaux et du béton.

Je regardais les chantiers qui explosent un peu partout, les mains de travailleurs qui s'affairent, serrent des boulons, conduisent des machines et soudent des tubes.

Et j'ai pensé à ces gens qui allaient à Aulnay, comme tous les jours, qui revenaient peut-être de vacances, avec encore du sable dans les mains.

Des mains esquintées, usées sur des machines-outils et des postes automatisés.
Des mains de soudeurs, mécanos, d'ouvriers, qui ne s'useront bientôt plus dans leur usine.

Combien de gestes répétitifs ont-elles répétés?
Pour combien de pots de départ ont-elles levé des verres?
Combien de fois ont-elles ouvert des casiers, des portes et éteintes des lumières?
Combien de barres de RER ont-elles agrippées?


Je pensais à ces gens que je ne connais pas, mais que je ne verrai plus, dont je n'observerai plus les mains calleuses accrochées aux barres des wagons.

Aujourd'hui je me suis dit qu'à Aulnay, des mains allaient bientôt arrêter de s'activer, parce que ce sont leurs propriétaires qu'on a traité comme des outils.











Et moi.
Moi, aujourd'hui, je continue d'utiliser mes mains.
Pour une horloge en formica vert à réparer et un projet à terminer.




mardi 21 août 2012

Little Cabin Home on the Hill / Bill Monroe





Non, je ne suis pas parti en vacances ni mort de canicule puisque:

-1 Je ne suis pas SI vieux.
-2 Je ne suis pas encore en vacances.
-3 Je ne suis vraiment pas SI vieux.
-4 Je suis bien les conseils que me donne le ministère de la santé et je m'hydrate régulièrement bien comme il faut.

"Buvez même quand vous n'avez pas soif et allez à l'ombre."

Il est évident que ces conseils sont vachement simples à suivre, surtout quand il s'agit de boire même quand on n'a pas soif.






Non, je profite simplement du fait que nous ayons les mêmes températures qu'à la surface du soleil pour flâner avec mes lunettes de soleil et mes écouteurs, je lance chaleureusement (ha ha!) (j'aurais aussi pu dire "à brûle-pourpoint" et j'aurais fait le jeu de mot du siècle, mais étant de nature humble et discrète, je me contenterai d'être drôle.) des "bonjour", des "ça va?" et des "pffffiouuuu, quelle chaleur" bien hydraté aux gens que je croise (qui me prennent bizarrement pour un fou ou un alcoolique) et je lis des livres et le Monde pour faire croire que je suis érudit quand je ne suis qu'en état déshydraté avancé.

Et au fil de mes lectures en caleçon en terrasses sur mon canapé, qu'apprends-je?

A cause de la sécheresse aux USA et à la faible productions de céréales, le prix de la bière va augmenter !!

Mais cette sécheresse terrible à des conséquences bien plus tragiques et terre à terre que le prix de l'ivresse puisque des éleveurs sont obligés d'abattre leurs troupeaux faute de pouvoir les nourrir et des paysans se retrouvent dans des situations financières catastrophiques.
Neil Young -Génie Génial- avait d'ailleurs lancé le "Farm Aid" en 1985, gigantesque concert pour récupérer des fonds et aider les agriculteurs et il le continue encore de nos jours.

Je ne vous demanderai pas d'envoyer des billets pour les fermiers de l'Iowa, soyons sérieux.
Ayez simplement une pensée pour ceux qui triment en France.
Cousins Weber, je pense à vous et je vous dédie cette chanson. Une petite Maison sur la Colline.

Et pendant que je pensais à mes cousins, à leur troupeau, à leur (futur) fromage et leurs tracteurs, je me suis décapsulé une canette d'eau au houblon et j'ai bu à leur santé, pensant que je ne pensais pas assez à eux.

Mes amis, chaque goutte de bière vient d'un joli terrain où quelqu'un a marché, gratté, semé, récolté, parce qu'il aimait le sol sur lequel il est né.


Et sous mes tropiques de gaz d'échappements et mes champs de béton, mon cerveau s'est mis en ébullition...

Je me suis lancé dans un beau projet.

Avec mes mains et un peu d'eau.

mardi 7 août 2012

Easy Come, Easy Go / Bobby Sherman



Puisque la vie ne fait rien qu'à mettre des bâtons dans les roues, par exemple en construisant des immeubles de 6 étages avec ascenseur mais en faisant tomber les ascenseurs en panne pour une durée indéterminée ou en alors en inventant (sans doute un soir de cuite) la gastro les soirs de rendez-vous galant et l'envie très forte d'aller aux urinoirs alors que vous êtes confortablement installé dans votre fauteuil, que la lumière vient de s'éteindre et que le générique d'Autant en Emporte le Vent illumine l'écran de son technicolor majestueux, des publicitaires et des as du marketing on inventé le concept de "facile"

Un régime? Perdre 25 kilos en trois semaines juste avant l'été? -Facile. suivez notre régime facile!

Une rencontre? Trouver l'âme soeur, l'unique, la vraie, celle qui donne envie de chanter le matin et de se coucher tôt le soir? -Facile. Insrivez-vous sur trouverlâmesoeurluniquelavraiecellequidonneenviedechanterlematinetdesecouchertôtlesoirfacile.com

Un crédit? Racheter Universal Studios ou Apple, financer l'achat d'une Ford Mustang avec un apport négatif? -Facile. On vous attend chez desousfaciles.


Mes amis, écoutez bien mon conseil:

Quand la vie, cruelle enchanteresse des bois maudits et ses experts en marketing vous promettent richesse, gloire, fortune, régimes, crédits, rencontres et utilisation de machines complexes comme des têtes thermonucléaires.

Mais tout ça, facile.

Ayez confiance.

Sauf quand elle vous promet une ouverture facile sur votre emballage de charcuterie.




vendredi 3 août 2012

Trio Opus 11: Adagio / Ludwig Van Beethoven




Puisqu'il faut tirer avantage de toute chose, il faut bien tirer avantage du trafic interrompu de la ligne 4 de métro (certainement en raison d'une mort atroce et douloureuse ou d'un problème d'acheminement de chauffeur, en retard à son boulot parce que lui-même coincé dans un métro en panne. Ligne 7 Bis.)  quand vous désirez rentrer chez vous après une journée que les spécialistes de la City et de Wall Street qualifient dans leur jargon technique de "franchement dégueulasse"

Arrivé Gare du Nord jeudi après une journée "Franchement Dégueulasse" donc, j'ai un instant cru pouvoir prendre le métro, ballet berçant de portes et de klaxons pour rentrer péniblement chez moi, mais la présence d'un cordon de sécurité tendu par des militaires stationnés comme des pions de jeu d'échecs aux entrées de la station ainsi que le ballet hystérique de messieurs qui portaient des parkas fluos très moches où le mot SAMU clignotait en bleu m'a finalement donné un indice plus que solide quand à mes probabilités d'être chez moi rapidement.

Je suis donc rentré à pieds, remontant le boulevard Magenta au milieu des vélos, des jupes et des poussettes.

J'ai sorti mes lunettes de soleil car Hélianthe mon ami me réchauffait les joues et me donnait envie d'acheter des tournesols.

Et au milieu du vacarme des bus, des magasins de mariages, des vélos et des jupes qui se soulevaient au gré de pas légers comme des danses, j'ai entendu, sortant d'une fenêtre grande ouverte, cette merveille de vent et de cordes.

Alors, je me suis arrêté, au milieu de la foule bigarrée et bagarreuse, je me suis assis et tout le franchement dégueulasse (comme disent les scientifiques) s'est envolé.

Emporté par cette tempête de notes.


Je n'ai pas vu les magiciens qui pratiquaient ce tour fabuleux, tout au plus un bout de manche de violoncelle qui se balançait comme un mât de bateau.

Je n'ai finalement vu que la beauté du geste, ce qui rend cet instant d'autant plus magique.
Les sorciers ne révèlent jamais leurs secrets.


Il est bon de ne pas avoir de métro parfois.








Ne me croyez pas incollable en blind test sur la musique classique, je reconnais déjà pas un do d'un la.

Mais vette musique, je l'ai reconnue car elle est dans le formidable film "La Crise" de Coline Serreau que je vous invite à regarder sur-le-champ si vous désirez bien vivre la vôtre.