jeudi 16 juin 2011

Kick, Push / Lupe Fiasco



Le hasard fait parfois bien les choses.

En rentrant de ma séance hebdomadaire chez mon psy, (qui d'ailleurs est d'accord avec moi: Oui, l'homme est condamné à se faire illusion sur lui-même. Exemple: Mélanie Laurent. 19/20.) j'ai croisé une joyeuse bande de skateurs qui arpentait les rues du XVIIIème sur leurs planches de bois montées sur leurs roues en uréthane.

Et je me suis rappelé combien je trouvais ce sport joli et surtout véritable sujet de réflexion sur l'art et l'urbanisme.

J'adore le skate, mais je ne suis absolument pas skateur moi-même vu que j'éprouve quand même quelques réticences à voir mon visage décapé sur un trottoir.

Oui, je trouve que le skate est un art, car il propose un discours sur l'urbanisme.

En utilisant le mobilier urbain (bancs, marches et rampes d'escaliers, plans inclinés) et en le détournant de sa fonction originale, le skateur pose un vrai dilemme: proposer une nouvelle fonction à un objet et ainsi en modifier la nature tout en le dégradant irrémédiablement à coups de passages répétés sur son revêtement.
En gros, les skateurs inventent une nouvelle utilisation d'un bout de béton, se réappropriant ainsi totalement un espace, lui donnant une nouvelle raison d'être, et le déglinguent en même temps à coups de glissades rageuses avec leurs trucks (les supports des roues) et rendant ainsi son utilisation impossible (ou alors vachement plus aventureuse et sujette à provoquer la chute qui brise les coudes et pète les dents.)

Un art qui sublime et détruit.
Un mariage entre l'architecture et le mouvement condamné à n'être qu'éphémère.

Pour moi, le skate est la plus pure preuve d'utilisation d'un espace au sein d'une cité.

C'est une forme d'expression propre à la ville.

Le vélo, on peut en faire partout, des graffitis, on peut en poser sur des arbres ou des montagnes si on est un gros relou qui ne respecte rien, mais pour le coup, le skate ne trouve son épanouissement total qu'au sein d'un amas complexe (et parfois design) de fer et de ciment.

Le skate n'est pas qu'un moyen de transport qui permet une liberté totale, filant comme le vent en zig-zaguant entre les bus et les piétons, le skate est une forme d'expression visuelle qui inclut intimement la ville, l'architecture et son mobilier quotidien dans sa grammaire.

La chose que j'adore, par exemple, quand je vois des riders glisser sur des plans inclinés ou des pièces de béton posée là pour faire joli, c'est qu'ils apportent l'idée de la mécanique à une structure dont le but premier est justement d'être fixe.

Et je trouve ça beau.

Le Hasard fait bien les choses, parce qu'en rentrant chez moi ce soir, je me suis aperçu que la chaîne Arte diffusait un documentaire sur le skate qui racontait en beaucoup mieux que moi cette idée d'expression en mouvement au sein d'un environnement fixe.

Je vous conseille fortement la vision de ce documentaire très intéressant en vous ruant sur le site de la chaîne Arte.tv où il peut encore être visionné dans leur rubrique Arte + 7.

Et si je trouve que le skateboard est de l'art, la boucle se ferme de façon parfaite lorsqu'un skateur décide de rider une oeuvre d'art urbaine.

C'est le travail que propose Raphaël Zarka, artiste plasticien dont j'ignorais jusqu'à l'existence jusqu'à ce qu'on m'offre ce petit livre, devenu une véritable bible au fil du temps:


Raphaël Zarka fait aussi de la photo et parfois, cela donne ça:


Une oeuvre d'art qui devient une autre oeuvre d'art.
Beau...

Et l'oeuvre d'art devient totale lorsque c'est l'environnement qui devient le sujet, et non plus le skateur, comme sur les photos de Fred Mortagne.




Et avant tout, les skateurs se déplaceront à l'envie, en liberté totale, roulant complètement au hasard.

Et là encore, il fait plutôt bien les choses...

4 commentaires:

Boulsquad a dit…

C'était surement un petit oubli dans ton post mais comment ne pas mentioner Dogtown & Z Boys : http://www.youtube.com/watch?v=HSpdcY-THDQ

moyenman a dit…

Et bien non, ce n'est pas un oubli cher ami, mais le but ici n'était pas de faire un historique du Skateboard.

Effectivement, Dogtown and Z-Boys est la référence en matière de film de skate (au même titre que Riding Giants, du même réalisateur -Stacy Peralta-) est la référence du film de surf.

Mais ici, je préfère m'attacher à la place du skate dans un environnement et à la façon dont il l'occupe.

L. a dit…

C'est cool que tu aimes le livre de Raphaël Zarka et son approche du skate dans le milieu urbain.
Deux petites précisions :
- sans faire de publicité, il existe une réédition augmentée de ce livre aux éditions b42 (commande possible via ce lien : http://www.editions-b42.com/books/chronologie-lacunaire-du-skateboard-1779-2009/) et une version anglaise également.
- la photo n'est pas de Raphaël Zarka mais d'Alexis Zavialoff prise à Utrecht en 2001. Le skateur est David Martelleur et la figure un 'pivot to fakie'. Raphaël ne fait pas de photo de skateurs mais collectionne les photos mettant en scène ces skateurs sur des sculptures d'art public...

Kiddie a dit…

mmmh j'ai l'impression que ce certain L. a des intérêt auprès de l'artiste et connait plutôt bien son travail... :-)