samedi 28 juillet 2012

It Keeps You Runnin' / The Doobie Brothers






Les Jeux Olympiques de Londres ont démarré en fanfare hier grâce à une magnifique cérémonie d'ouverture réalisée par l'incroyablement talentueux Danny Boyle et c'est l'occasion pour moi de vous reparler un petit peu de sport et de la raison pour laquelle je pleure comme une collégienne devant des athlètes qui gagnent et des athlètes qui perdent.

Mes moments préférés des Jeux Olympiques.

Barcelone 1992, Basket-Ball, le rêve de la Dream Team.

La plus grande équipe de sport collectif de tous les temps.

Tout d'abord, remettons-nous un peu dans mon contexte à cette époque.

Il faut savoir qu'en 1992, les images de la NBA étaient très rares, le câble ou canal plus n'étaient pas encore développés et internet n'était qu'un délire de science-fiction encore très loin.
Il était donc difficile d'accéder aux exploits des basketteurs professionnels de la ligue Nord-Américaine mais leur renommée dépassait toutes les frontières et ils étaient déjà des idoles planétaires.

On ne pouvait voir leurs actions que sur des cassettes vidéos (alors mes jeunes amis, une K7 video, c'est l'ancêtre de vos DVD ou Blu-Ray, c'était une grosse boîte de plastique noir à l'intérieur de laquelle une bande magnétique contenait de l'image et du son et pouvait être lue sur un magnétoscope. Une autre grosse boîte noire. Il fallait la rembobiner pour revenir au début et pour passer d'un chapitre à l'autre, fallait appuyer sur avance rapide et attendre des plombes.) que l'on s'échangeaient à la récré.

En 1992, je découvre tout juste le Hip-Hop dans mes oreilles ahuries et les grands joueurs de la NBA devant mes yeux ébahis, donc.
Et un roi commence son ascension.

Michael Jordan.

Mais revenons aux Jeux.

Le Comité Olympique Américain commence à en avoir un poil ras-le-bol de perdre le titre en basket et décide donc d'autoriser les joueurs professionnels à participer aux jeux.

Ils contactent Earvin "Magic" Johnson, légende absolue, pour lui proposer de monter une équipe et d'en être le capitaine.
Il accepte immédiatement.

Car pour Magic Johnson, le challenge va au-delà de la victoire.

9 mois auparavant, il a annoncé sa séropositivité et veut prouver que l'on peut pratiquer un sport à très très haut niveau avec le virus du sida.
Il contacte Larry Bird, son ami et rival de toujours, ravi de jouer à ses côtés pour la bannière étoilée.

Et ils s'adressent d'emblée à Michael Jordan.

Et Michael Jordan fait son Jordan. Il fait sa star et se fait désirer.

C'est finalement sa mentalité de compétiteur qui le pousse à accepter.

Pour la victoire, certes, mais surtout pour observer les méthodes d'entraînement de ces deux géants du Basket-Ball, sachant qu'il devait encore les affronter pour une paire d'années et donc emmagasiner le maximum d'informations sur eux afin de trouver des méthodes pour les battre.

L'équipe finale est alors composée de:

Magic Johnson
Larry Bird
Karl Malone
David Robinson
Clyde Drexler
Scottie Pippen
Charles Barkley
Chris Mullin
John Stockton
Patrick Ewing
Christian Laettner
et son Altesse, "His Airness" Michael Jordan

(Line-Up ahurissant quand on y pense et surtout d'un niveau qui n'a jamais été égalé depuis, tous sports confondus)

Voir autant de stars et d'égos éléphantesques dans une seule équipe aurait pu facilement courir à la catastrophe.

Et le génie viendra de leur coach: L'Immense Chuck Daly des Detroit Pistons

Pour leur premier match, il les oppose à une équipe universitaire et les envoie sur le terrain sans leur donner une seule indication pour les laisser prendre leurs décisions seuls.

Ils perdent lamentablement.

Le message de Daly est clair: Vous êtes une grande équipe, mais sans moi, vous n'êtes rien et surtout sans moi, vous perdrez.

Le lendemain, ils rejouent contre la même équipe, leur collent une déculottée fracassante et la légende entre en marche.

Il n'aura suffit que d'un seul jour pour que cette équipe de rêve prenne ses marques.

Arrive Barcelone.

Ils sont reçus comme des chefs d'états, le public est en délire, leurs adversaires se prennent en photo avec eux avant, après et pendant les matchs.

Et ils régaleront le monde par leur jeu hors du commun.

Un show inoubliable où je retiendrai les sourires gigantesques de Magic Johnson, heureux comme un gosse de jouer des JO pour son pays et fier de vivre la vie qu'il voulait, sans laisser le virus le lui interdire et les vols en apesanteur de Michael Jordan, un de ces sportifs qui me prouvent chaque jour que la beauté peut se rechercher dans la perfection d'un geste et la détermination à l'atteindre.
Une pefection que je range aux côtés de Zinedine Zidane et de Mohammed Ali.

En 1992, je ne suis qu'un gosse de 13 ans qui regarde des étoiles aller plus haut que le ciel.








Barcelone 92, 10.000 mètres Féminin, Le tour d'honneur de Derartu Tulu et d'Elana Meyer

Derartu Sulu est Ethiopienne et noire.
Elana Meyer est Sud-Africaine et blanche.

En 1992, à Barcelone, Mme Tulu devient la première africaine noire à gagner l'or olympique.
Un évènement déjà historique pour cette petite Ethiopienne gardienne de troupeaux sur les hauts plateaux qui s'est certainement entraînée sur des cailloux.

Mais l'histoire ne s'arrête pas à la victoire.

La médaille d'argent revient à Elana Meyer, Afrikaan Blanche.

Et Elana rejoint Derartu, l'embrasse et sous leurs bannières respectives entament un tour d'honneur incroyable.
En quelques foulées, ces deux petits bouts de femme effacent la honte et la violence, font taire les canons et les chiens et montrent au monde que l'Apartheid est loin.
Que l'Apartheid n'est plus la question des hommes mais des ignorants.
Et des aveugles.






Rome 1960, Marathon, La Longue Course d'Abebe Bikila

Abebe Bikila est Ethiopien (lui aussi) et ancien membre de la Garde Impériale de son Altesse Haïlé Sélassié.

Comme on trouve au palais qu'il ne court pas trop mal, on l'envoie à Rome participer au marathon.
Il est entraîné par Onni Niskanen, un membre de la croix-rouge, un Suédois d'origine Finlandaise féru d'athlétisme et qui voit en lui une chance de médaille.

A cause de l'incroyable chaleur qui étouffe la capitale italienne, le Marathon se court le soir avec une arrivée de nuit.

Et Bikila court alors pieds nus.
Toute sa vie il a couru pieds nus et les quelques chaussures offertes par l'empereur ne sont pas assez confortables pour lui.

Il court alors comme sur ses hauts-plateaux, pays des troupeaux et des lions et dépose le favori algérien au 41ème Kilomètre.

Il court sous les yeux de Marc-Aurèle et des empereurs de marbre, passe sous l'arche de Constantin, bat le record Olympique et se contente de quelques étirements.

24 ans avant, Benito Mussolini  conquit le pays des chêvre et des lions.
Abebe se contenta de se promener pieds nus devant des empereurs.






Atlanta 1996, 200 m et 400m, la Loco de Waco

Voir en direct sur une petite télévision dans un appartement face à la mer en Espagne un tel exploit est presque un privilège.
Pas uniquement parce qu'être face à la mer est un privilège mais parce que vous vous rendez soudainement compte comment des années de sacrifice, d'entraînement et d'abnégation trouvent leur résolution en 20 secondes sur une piste en tartan.

L'Américain Michael Johnson est texan.
Il se met à l'athlétisme par hasard puisqu'il préfère les études.
"Il a les jambes trop courtes" disent les entraîneurs universitaires, "il ne sera jamais un athlète de classe mondiale".

Il s'en fout, il préfère les études.

Et alors Michael Johnson rencontre Clyde Hart, celui qui sera son entraîneur jusqu'à sa retraite en 2001.
Ensemble ils développent une technique de foulée permettant au Texan de compenser ses jambes trop courtes.

Il passe par des échecs et des éliminations.

Mais en 1996, il est champion du monde du 400 et du 200 mètres et décide de s'aligner sur les deux distances pour tenter de gagner l'or olympique, ce que personne n'avait réussit avant lui.

La Loco de Waco, avec ses chaussures en or va alors se mettre en marche.
Il ne va pas simplement gagner les deux courses, pulvériser des records et entrer dans l'histoire.

Il va montrer qu'il est seul au monde.
Que tout ce travail, ces efforts et ces essais l'ont propulsé au panthéon, sur l'Olympe de la piste.

Il a des kilomètres d'avance, colle tous ses poursuivants deux heures derrière lui.
Il donne l'impression qu'une fois arrivé, il pourrait se prendre un coca, s'asseoir tranquillement et regarder ses adversaires enfin finir la course.

Il est mercure et flash, fait mine de figer le temps et enflamme un stade.

Car sa fréquence de course ahurissante, son rythme mécanique, sa concentration absolue et surtout sa profonde détermination le placent hors du temps et de l'espace pendant 20 secondes.

20 secondes incroyables, un éclair, qui ont du paraître extraordinairement longues pour ses adversaires.

Le 400 mètres est déjà légendaire.



Mais le doublé sur 200 mètre achève d'écrire l'histoire.



"Il a les jambes trop courtes. Il ne sera jamais un athlète de classe mondiale."

Il s'en fout.



Barcelone 1992, 400 mètres, L'incroyable histoire de Derek Redmond et de son père

Derek Redmond est anglais et un des favoris pour le titre sur 400 mètres.

Le coup de feu donne le signal du départ mais c'est une blessure au dos qui foudroye Derek.
Il s'effondre sur la piste.

Pour sa première participation aux Jeux, le jeune homme est abattu, dans une détresse sans fond et pourtant il se relève et décide de terminer sa course à cloche-pied.

Son père saute alors sur la piste, envoie voler les officiels et l'aide à franchir la ligne.

Dans les bras l'un de l'autre, ils oublient le stade, la compétition, les juges et les chronos et dans les bras l'un de l'autre, il partagent la douleur.

Pas de victoire ici.

Et pourtant, la plus belle course du monde.




Et je vous parlais de recherche de perfection au début.

Voila pour moi ce qu'est la perfection.

Une fillette cachée derrière un mur en Roumanie, qui vole avec grâce, touchant à peine ses barres asymétriques et se fend d'un large sourire.

Montreal 1976, Barres Asymétriques, le vol parfait de Nadia Comaneci






Voila, je m'arrêterai ici, vous laissant fouiller dans vos propres souvenirs.

Je vous encouragerai simplement à regarder les Jeux, pas forcément pour le sport (encore que le joie de voir du Beach-Volley féminin inonde mes yeux en ce moment-même) mais pour connaître un peu l'histoire de ces athlètes que personne ne connait, qui traversent la planète, qui viennent de pays en guerre, qui s'entraînent en secret, sur des pierres ou dans des champs de mine pour la joie de concourir pour leurs nations et tenter, pendant quelques secondes dans leur vie, de toucher un rêve ou d'atteindre la perfection.


Je finirai en citant humblement Jesse Owens, afro-américain qui fit l'affront de gagner les jeux de Munich en 1936 sous les yeux fous d'Adolf Hitler.

( Il faut savoir qu'au concours de saut en longueur, lors des qualifications, il mord ses deux premiers essais.
C'est alors Lutz Long, son adversaire, archi-favori et représentant parfait du rêve Aryen de l'oncle Adolf qui lui conseille de reprendre ses marques et de partir de plus loin en rallongeant sa course d'élan.
Il se qualifie de justesse.
Après un concours anthologique, Owens gagnera l'or (après avoir gagné le 100 mètres. Il gagnera encore le 200 mètres et le relais.) et Lutz Long sera le premier à venir lui serrer la main et à le féliciter.
Ils resteront amis jusqu'à la mort de Long en 1943, pendant la guerre. Dans son Testament, Lutz Long s'adresse d'ailleurs à Jesse Owens et signe "ton frère, Lutz" )

«Vous pourriez fondre toutes les médailles et toutes les coupes que j’ai gagné. Elles ne vaudraient pas grand chose comparées à l’amitié à 24 carats que j’ai éprouvé pour Lutz Long».













J'ajoute que je vais encourager au taquet l'équipe de France Féminine de Football qui propose plus de jeu en une mi-temps que les garçons depuis 4 années.

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