mardi 21 février 2012

Le Jeu du Sample du Jour: Crack a bottle (Feat. Dr Dre & 50 Cent) / Eminem



Dans leur chasse effrénée aux sons qui vont pulvériser vos enceintes et liquéfier les dancefloors, les producteurs  de hip-hop rivalisent d'audace et de curiosité pour trouver le sample le plus improbable.

Celui qui, parti d'une banale chanson bien inoffensive, deviendra sous leurs assauts à coups d'effets une ritournelle méchante et agressive au point de lessiver vos oreilles sans prendre le temps de rendre votre dépouille.

Le talent de ces archéologues de la musiques est justement de trouver le petit bout intéressant d'une chanson dont on aurait jamais imaginé qu'ils puissent en connaitre l'existence.

Imaginez donc Dr Dre, énorme producteur de tubes west-coast, vendeurs de disques par millions de tonnes, découvreur d'Eminem et Snoop Dogg, producteur de 2Pac et symbole même du rap californien avec ses chansons à la subtilité d'une panzer division perdue dans Limoges rentrer dans son studio et crier fièrement à la cantonnade: "yo négros, j'ai trouvé un beat qui tue sa mother."

Les dits négros (dont Eminem fait éminemment partie) écoutent religieusement, applaudissent et imaginent déjà les paroles les plus méchantes qu'ils vont pouvoir poser sur le son de char d'assaut qui se bat contre un tracto-pelle sorti par leur parrain.

Mais, jeunes naïfs, d'où pensez-vous que ce bon vieux toubib à sorti ces quelques notes qui fracassent le bois du parquet vernis de ce studio high-tech dans lequel vous allez enregistrer votre prochain disque d'or?

Non, il ne s'agit pas d'un James Brown oublié ou d'un artiste funk auteur d'un unique tube en 1973.

Avant de vous révéler l'insoutenable réalité, imaginez-les encore, casquette vissée sur la tête, casques de 12 kilos sur les oreilles, déambulant sur le front de mer de santa monica en reluquant les cagoles en bikini ou trainant à Compton avec leurs potes.

Les gros gaveurs de millions qui font les bad boys au volant de leurs cadillacs surgonflées, ils rappent sur du Mike Brant.

Oui, LE Mike Brant de "Qui saura" et de "Rien qu'une larme"

Celui qui faisait pleurer vos mères dans ses chansons avant de les faire pleurer tout court en tombant sottement du 6ème étage le 25 avril 1975.



Outre le fait que l'idée de choper du Mike Brant pour en faire une chanson qui ferait passer le son d'un engin de chantier pour un gazouilli printanier relève du génie pur, ce qui me fascine est la capacité qu'ont ces gars-là à tout écouter. (bon, c'est un peu leur taf, c'est vrai.)

Et c'est là que je me rend compte que parler de Dr Dre, Eminem et Mike Brant dans le même post, dans la même phrase même, a quelque chose d'hautement improbable (même si indéniablement marrant, il est vrai.)

Chercher pendant des jours les quelques mesures, le break de batterie, le solo de guitare qui va servir de point de départ à un hit interplanétaire (ou une grosse daube sans nom, c'est selon.)

Et les chanteurs francophones ont apparemment la côte chez les rappeurs puisque outre ce bon vieux Mike qui fait la joie d'Eminem, Dr Dre a aussi samplé Aznavour et son "Parce que tu crois" pour la chanson "What's the difference" tirée de son chef-d'oeuvre Chronic 2001 et Jay-Z a samplé "Une nuit sur son épaule" de Véronique Sanson pour "History" sa chanson hommage à Barack Obama.

Les découvertes musicales ne cesseront de m'étonner.

L'occasion pour moi de vous annoncer un set spécial Sampleurs, Samplés et reprises au Baron Samedi, le bar le plus cool de Paris Vendredi 24 février (oui, ce vendredi-là) par Moyenmoi-même et son acolyte Soulman Guillaume.

Et de vous rappeler le dossier que j'avais consacré à Dr Dre sur le formidable site centrifugue de mon formidable ami Gwendal et dont la suite arrive très très vite (promis, mec!)

http://centrifugue.fr/2011/dr-dre-ou-le-remede-par-le-beat-1-5-a-nigger-with-attitude-1986-1992/

http://centrifugue.fr/2011/dr-dre-ou-le-remede-par-le-beat-25-guerres-et-beats-1992-1996/

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