Bonne nouvelle, je ne suis pas paralysé.
Pas de tétraplégie, pas de fauteuil roulant et pas de clignements de paupières pour communiquer.
J'ai une lombalgie aigüe dixit mon toubib, et, pour la première fois de ma vie, je suis en arrêt maladie.
Pour trois jours.
Mais revenons un peu en arrière.
Revenons à mon rendez-vous chez mon médecin.
Je suis dans une salle d'attente très simple. Très moche surtout.
Papier peint jaunâtre, sièges verts.
J'interromps mon récit pour vous préciser que NON, je ne fais pas exprès de me retrouver dans des situations ahurissantes dans les salles d'attentes.
Je m'en passerais bien.
Je ne suis pas tout seul dans cette salle d'attente donc, mais cette fois-ci, j'évite toute occasion de m'humilier en public (sauf quand j'ai voulu m'asseoir sur la moche chaise verte et que ça a pris 17 heures à cause de mon dos en carton.)
De la musique classique sort des enceintes posées sur le sol.
mmmmh, c'est bien la musique classique, ça détend.
Un enfant gribouille sur son cahier, c'est mignon.
Enfin, gribouille...
Disons qu'il cherche à déchiqueter son cahier avec la pointe de son stylo.
Coquin, va.
Ah oui, mais il y va franchement, là, ce petit chenapan...
Et il imite le brontosaure en même temps, dès fois qu'il soit effrayé d'être trop discret, ben voyons.
Bon, il va se détendre le gniard, là, avec son art primitif et ses plaintes de primate?
Et puis la musique classique, ça stresse un peu au bout d'un moment...
Je me retrouve enfin seul, attendant fébrilement mon tour.
Enfin, pas longtemps, puisque je suis rejoins par une jeune fille (un instant, j'ai cru que c'était la même que dans la salle d'attente de mon psy et là, je dois vous avouer que j'aurai définitivement pensé que mon karma est le plus pourri du monde mais aussi le plus farceur. Et je me serais enfui en courant. Mais en fait, non, ce n'était pas elle, mais certainement sa soeur...)
Comme je veux éviter toute bourde hypothétique, je ne dis rien, faisant semblant de lire un magazine de décoration réservé aux gens qui doivent décorer des hôtels particuliers dans le 16ème ou relooker des ferrari.
Et là, radio-chopin (si, si, je vous jure, c'était radio Chopin, je serais incapable d'inventer un truc pareil.) nous balance la marche funèbre (je vous re-jure que c'est vrai. Et c'est parce que c'est vrai que c'est incroyable et beau.)
Mais la vraie Marche Funèbre, la glauque, celle qui vous invite à abandonner tout espoir, vous annonce que c'est la fin et qu'il faut l'accepter.
Celle-là:
A ce moment-là, je me mords les lèvres jusqu'au sang.
1, pour ne pas hurler de désespoir.
2, pour ne pas me marrer comme une grosse baleine, vu qu'après tout, la jeune fille qui m'accompagne est peut-être atteinte d'une maladie incurable et je ne voudrais pas jeter un froid.
(ceci dit, je confirme, la marche funèbre, c'est pas vraiment au poil pour réchauffer l'ambiance, j'ai déjà vu mieux...)
Heureusement, elle esquisse un léger rire en premier, du coup, je lâche un "héhé" très sobre de mon côté, et je lui dis que quand je vais raconter ça, personne ne me croira.
Elle rit un peu plus, je sourit et le docteur Frankenstein (enfin, son frère, mais celui qui a raté ses études.) vient me chercher.
Je mets un peu moins longtemps pour m'asseoir dans le fauteuil dans son cabinet (seulement une quinzaine d'heures) et là, c'est parti.
Lui: mmmmh-mmmmh, vous avez mal au dos
Moi:
Lui: mmmmh-mmmmmh et vous avez fait un mouvement bizarre?
Moi: J'ai sauvé toute une famille de maliens des flammes et d'un marchand de sommeil.
Lui: mmmmh-mmmmh ah oui, forcément.
Moi: oui, vous comprenez, c'est en rentrant dans la chambre du dernier (et de ses cousins, sa tante, le grand-père et la belle-soeur) un mur porteur m'est tombé sur le dos, et là, crac!
Lui: Le dos.
Moi: Non, le mur.
J'abrège ici volontairement ce dialogue, par modestie surtout, ne voulant pas étaler à la face du monde les sacrifices héroïques que je suis prêt à faire pour mon prochain (et surtout pour des familles entières de Maliens victimes des flammes et des marchands de sommeil...)
Comme monter sur une chaise pour changer une ampoule...
J'ai trois jours d'arrêt maladie.
Espérons que le Monde tienne le coup...
(à noter que The Hollies, c'est le premier groupe de Graham Nash, de Crosby, Stills et lui, donc. Et Young, parfois.)
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